2001_01_24
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SdT volume 7, numero 1.
LA CITATION DU MOIS
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Descriptive linguists are assumed to be
"non-theoretical", and to differ from
"true theoretical linguists" rather as
butterfly-collectors differ from
lepidopterists.
Geoffrey Leech
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SOMMAIRE
Voeux
1- Coordonnees
- Bienvenue a Teresa Espar, Frederic Gobert, Aurelien Benel,
Andrea Rocci, Massimo Leone, Driss Ablali.
- Mise a jour des adresses des abonnes : Natalia Petrovna
Anissimova, Houssem Assadi, Pierre Beust, Evelyne Bourion,
Michel Charolles, Gabriel Otman, Aboubakar Ouattara, C.T.Pais,
Jean-Michel Salanskis, Theodore Thlivitis, Pascal Vaillant.
2- Carnet
- Recrutements.
- Programmes de seminaires :
Semiotique du gout
Rythme en semantique et en semiotique (Ballabriga)
Incorporation du sens et semiotique du corps (Petitot)
- Offre de PhD sur les genres textuels dans le corpus BNC.
3- Publications
- Methodos, Sommaire du n°1 : La philosophie et ses textes.
- Presentation de publications de Franck Neveu :
Etudes sur l'apposition (corpus J.-P. Sartre)
Nouvelles rech.sur l'apposition (revue Langue francaise)
Lexique des notions linguistiques
Des noms -Nomination, designation, interpretations
et mention d'autres publications.
4- Textes
- F. Gobert : parodie de cours extraite de "Bande de stylistes!"
- F. Rastier : Humanités et sciences humaines.
5- Appels : Colloques et revues
- Colloque international "Saussure apres un siecle"
Geneve-Archamps, 23-27 juin 2001.
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LES VOEUX DE L'ANNÉE
Du site lettres.net l'artisan valeureux,
C'est Jean-Eudes Gadenne qui souffle ces trois voeux :
"Bonne année, un bon siècle, un très bon millénaire !
Gradation, anaphore et beau rythme ternaire..."
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Coordonnees Coordonnees Coordonnees Coordonnees Coordonnees Coordonnees
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BIENVENUE AUX NOUVEAUX ABONNÉS
[information réservée aux abonnés]
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{FR, 17/01/2001}
Recrutements :
Jean-Michel Fortis a été recruté comme chargé de recherche au CNRS
(Histoire des théories linguistiques, Lyon).
Bénédicte Pincemin a été recrutée comme chargée de recherche au CNRS
(Laboratoire de Linguistique Informatique, Villetaneuse).
Yannick Prié a été recruté comme Maître de Conférences à l'Université
Lyon I.
Rattachement administratif : L'équipe "Sémantique des textes" est
maintenant rattachée à l'UMR "Modèles, dynamiques et corpus" de
l'Université Paris X - Nanterre.
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{FR, 17/01/2001}
SEMINAIRES
SEMINAIRE SEMIOTIQUE DU GOÛT
Dans le cadre du séminaire Sémiotique du goût (Ecole doctorale Concepts
et langages, Paris IV - Sorbonne).
5 février, 18h-19h30, Salles des Actes, rez-de-chaussée
(entrée recommandée : 54 rue Saint Jacques, première porte à droite).
Conférence de François Rastier : "Dégustation : des mots aux textes -
Une problématique de l'objet culturel"
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SEMINAIRE ORGANISE PAR MICHEL BALLABRIGA
UNIVERSITE TOULOUSE LE MIRAIL
Jeudi, 14h-16h, salle C 601 de la Maison de la Recherche.
Cadre : discours, genres et interprétation (sémantique des textes et
sémiotique)
Thème de cette année :
Problématique du rythme en sémantique et en sémiotique
jeudi 15/02/01 : Carine Duteil
Figures de rhétorique et rythme sémantique
jeudi 15/03/01 : Fabienne Plégat
Mise en pages, typodisposition et effets rythmiques
et Patrick Mpondo-Dicka
Compte rendu de lecture du livre de J. Ceriani :
Du dispositif rythmique
jeudi 19/04/01 : Joseph Courtés
Le rythme dans le visuel
La date et le programme de la journée d'étude qui aura lieu en mai 2001
seront précisés ultérieurement
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SEMINAIRE ORGANISÉ PAR JEAN PETITOT
Incorporation du sens et sémiotisation du corps
2e et 4e Mercredis du mois de 11h à 13h, EHESS, 105 bd Raspail, salle 1.
10 janvier : Jean-Jacques VINCENSINI (Univ. de Corte)
Le statut sémiotique de la stéréotypie : racines
historiques ou corporelles ?
24 janvier : Jean-Claude AMEISEN (Univ. de Paris 7)
La sculpture du vivant : le suicide cellulaire.
28 février : Jean PETITOT (EHESS)
Goethe et le Laocoon ou la première analyse structurale
14 mars : Michel COSTANTINI (Univ. de Paris 8)
Incorporation du sens et "présentification de l'invisible" :
à propos de la statuaire grecque.
28 mars : Danièle COHN (EHESS)
Le dossier Laocoon : Winckelmann, Lessing, Goethe
25 avril : Claudio GALDERISI (Université de Mulhouse)
La statue parlante.
9 mai : Séance thésards
23 mai : Ivan DARRAULT-HARRIS (Université de Limoges)
Freud et le Moïse.
13 juin : Conclusions
Renseignements:
J. Petitot, EHESS, 54 Bd Raspail, 75006 Paris, 01 49 54 20 38
petitot@ehess.fr
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{FR, 17/01/2001}
STYLES + CORPUS NUMÉRIQUE = CRÉATION D'EMPLOI ?
[Vu sur la liste Corpora]
De: Claire Cowie [c.s.cowie@sheffield.ac.uk]
Envoyé: mercredi 27 décembre 2000 14:04
À: CORPORA@hd.uib.no
Objet: Corpora: PhD research studentship at the University of Sheffield
The following PhD research studentship has been advertised at the
University of Sheffield, UK. Apologies for cross-postings.
The emergence of new genres at the end of the twentieth century :
innovation and text type in the British National Corpus
The project will examine change in genre and the emergence of new genres
or text types towards the end of the twentieth century, by analysing
stylistic features of texts that can be found in the British National
Corpus (BNC).
The BNC is a 100 million word collection of tagged electronic texts
(1975-1994), which includes written and spoken English, from a variety
of formal and informal contexts.
The discipline of English historical linguistics has become increasingly
concerned with text type, due to the way that searchable electronic
corpora enable us to quantify the use of features across many texts.
Historical corpora have been used to demonstrate how the use of a
stylistic feature in a text type can change over time, or how a whole
text type can change. These developments have been traced for historical
corpora which either cover earlier stages in the language only or cover
long stretches of time, not observing the twentieth century in any kind
of detail. Research on developments in the English language using the
BNC is still relatively new.
The aims of the project might be variously interpreted as :
- identifying the use and frequency of certain stylistic features in
text types of the BNC
- providing a description of those text types in terms of an
oral/literate dimension
- comparing findings for text types in the BNC to descriptions of text
types based on historical corpora
- providing an account of stylistic change over the 20 year period of
the BNC
* Arrangements for supervision
The successful candidate will be a member of the Department of English
Language and Linguistics which forms part of the School of English. The
project will be jointly supervised by Dr Claire Cowie and Dr Claire
Warwick from the department of Information Studies. Dr Cowie works on
word-formation and lexical innovation in historical corpora, with
particular reference to register differences. Dr Warwick works on
humanities computing, with a particular interest in the application of
computers to the study of English literature and language. She was
previously part of the BNC project team.
More information about the departments may be found at :
http://www.shef.ac.uk/uni/academic/D-H/ell and
http://www.shef.ac.uk/~is.
* Requirements
Applications are sought from candidates with a linguistics background at
undergraduate or master's level. Knowledge of subjects such as
stylistics, corpora, register studies, discourse analysis, text
analysis, retrieval and markup is desirable, but in-depth knowledge of
all areas is not compulsory, and any necessary training will be
provided. The precise areas studied and approach taken to the
investigation is negotiable depending on the successful candidate's
particular interests and capabilities. The studentship is restricted to
applicants from the EU.
The deadline for submitting applications is the 31st of January 2001.
Application forms and further details can be obtained from:
Fozia Yasmin, Graduate Research Office
Graduate Research Office
156 Broomspring Lane
Sheffield S10 2FE
Tel: +44 (0) 114 222 1404
Fax: +44 (0) 114 222 1420
Email : grad.school@sheffield.ac.uk
To discuss the project informally, please contact Claire Cowie
(0114 222 0217- c.s.cowie@sheffield.ac.uk) or Claire Warwick
(0114 222 2632 - c.warwick@sheffield.ac.uk).
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Publications Publications Publications Publications Publications
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{FR, 17/01/2001}
VIENT DE PARAÎTRE
METHODOS, Sommaire du n°1
La philosophie et ses textes
Les articles présentés ici reviennent sur le problème de la textualité
philosophique. L'étude du cas des mathématiques, prises entre le recours
au texte et la prétention à une pure idéalité, permet de réévaluer la
validité d'une réduction du texte philosophique à sa forme logique. La
linguistique peut mettre en évidence les effets sémantiques qui
caractérisent l'ontologie. Au cours de l'histoire, les philosophes
eux-mêmes n'ont pas toujours répugné à réfléchir sur la forme de leur
discours : dans la Grèce archaïque, le choix de la prose fut lourd de
sens. Au début du XIXe siècle, le romantisme allemand a fait de la
question de la forme un élément central de sa philosophie.
Jean-Michel Salanskis : Texte, mathématique, philosophie et sujet
Alain Herreman : La mise en texte mathématique :
une analyse de l' "algorisme de Frankenthal"
François Rastier : L'Être naquit dans le langage. Un aspect de la
mimesis philosophique
André Laks : Écriture, prose, et les débuts de la philosophie grecque
Denis Thouard : La question de la "forme de la philosophie" dans le
romantisme allemand
Analyses et interprétations
Jean Bollack : "Voir la haine". Sur les nouveaux fragments d'Empédocle
Rossella Saetta-Cottone : Aristophane : injure et comique.
À propos de Cavaliers 1274-1289
Myles Burnyeat : L'impiété de Socrate
Sabine Rommevaux : Aperçu sur la notion de dénomination d'un
rapport numérique au Moyen Âge et à la Renaissance
Isabelle Kalinowski : La littérature dans le champ philosophique
français de la première moitié du XXe siècle. Le cas de
Jean Wahl et de Hölderlin
Pierre Cassou-Noguès : Conscience et réflexivité dans la philosophie
mathématique de Cavaillès
Travaux
Compte rendu des activités de l'UMR "Savoirs et textes" pour les années
1999-2000 (séminaires, colloques, thèses, publications).
___________________________
Conditions de vente
Cette revue est en vente en librairie,
ou peut être commandée directement aux
Presses Universitaires du Septentrion
rue du Barreau B.P. 199
59654 Villeneuve d'Ascq Cedex - France
Internet : www.septentrion.com
email : sinaoui@univ-lille3.fr
Prix à l'abonnement : 120 F (+ 20 F de frais de port)
Prix au numéro : 150 F (+ 20 F de frais de port)
Conditions de publication
Les articles proposés (de 70 000 signes maximum) ne doivent pas avoir
été déjà publiés, ni être soumis simultanément à d'autres revues dans la
même langue. Ils peuvent être rédigés en français ou en anglais. Ils
doivent être remis en un exemplaire-papier, accompagné d'une disquette
ou d'un envoi par e-mail (thill@univ-lille3.fr) et d'un résumé bref (10
lignes maximum), en français et en anglais. Ils sont soumis au comité de
lecture. Les auteurs reçoivent gratuitement 20 tirés à part de leur
article ainsi qu'un exemplaire de la revue.
Les articles sont à adresser au secrétariat de la rédaction :
Florence Thill, UMR "Savoirs et textes"
Université Charles de Gaulle-Lille III, B.P 149
F-59653 Villeneuve d'Ascq Cedex
Tél. [33] (0)3 20 41 65 12
e-mail : thill@univ-lille3.fr
www.univ-lille3.fr/www/recherche/set
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{FR, 17/01/2001}
PRESENTATION DE PUBLICATIONS
Franck Neveu
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Etudes sur l'apposition - Aspects du détachement nominal et adjectival
en français contemporain dans un corpus de textes de J.-P. Sartre,
Paris, Honoré Champion, coll. "Grammaire et linguistique", 1998.
La vocation de cette recherche n'est pas d'illustrer une théorie
linguistique d'ensemble. Non qu'une telle entreprise soit dénuée
d'intérêt, mais l'expérience enseigne que ce type d'approche, du moins
lorsqu'il s'exerce sur une notion comme celle-ci, est généralement plus
fécond pour le modèle que pour son champ d'application, inévitablement
appréhendé de manière partielle. Il ne s'agit pas non plus ici de
réduire la description de l'apposition au seul domaine syntaxique. On a
cherché au contraire à articuler autour de la notion des axes d'étude
assez différents, et d'ailleurs généralement dissociés dans les sciences
du langage (histoire de la grammaire, syntaxe, sémantique phrastique,
sémantique discursive), en éprouvant au contact du corpus, chaque fois
qu'il apparaissait possible et opportun de le faire, les ancrages
conceptuels dominants.
Une telle direction de recherche, pour être fructueuse, appelle un
corpus qui autorise un examen comparé rigoureux du type et de
l'occurrence, afin de procéder à des analyses précises non seulement de
la matière verbale des constructions appositives, mais aussi de celle
plus aléatoire qui forme leur environnement, restreint ou large, selon
que l'on adopte à telle ou telle étape de l'investigation une
perspective phrastique ou transphrastique. Pour ce faire, il a semblé
nécessaire de convoquer un corpus homogène (même auteur, même structure
générique). En effet, une étude approfondie du fonctionnement
linguistique des constructions appositives doit pouvoir faire apparaître
les raisons qui conduisent le scripteur à adopter un tel mode
d'agencement verbal. Or on ne peut prétendre déterminer précisément ces
raisons que si l'enquête s'exerce sur un ensemble de textes restreint et
unitaire sur lequel on a effectivement prise. Aussi a-t-on fait le choix
de travailler sur l'oeuvre de Jean-Paul Sartre et de ne retenir de cet
écrivain polygraphe que quatre essais biographiques et
autobiographiques. La surabondance du système appositif dans Les Mots,
enregistrée tout d'abord, aurait sans doute pu suffire à l'examen des
constructions. Mais ne portant que sur une oeuvre, l'étude n'aurait
autorisé aucune explication générique du phénomène. Partant, l'analyse
linguistique n'aurait pu sortir des frontières fixées par la singularité
d'un discours littérairement marqué. On a donc pris le parti d'étendre
l'enquête à d'autres récits de vie -en mêlant le biographique et
l'autobiographique, qui chez Sartre connaissent de fréquents
chevauchements que la permanence d'une réflexion anthropologique permet
de comprendre. Ainsi, bien que constitué de textes aux conditions de
production très différentes, le corpus proposé pour ces études sur
l'apposition est-il caractérisé par une grande homogénéité discursive.
Comme l'indique le sous-titre de l'ouvrage, il n'est question ici pour
l'essentiel que des constructions appositives détachées de type nominal
et adjectival. Sont donc écartées de l'enquête les constructions dites
liées ainsi que les constructions appositives en phrase complexe
(relatives et complétives). La première étude ("Essai de présentation
historique de l'apposition") se propose de dégager les principales
étapes de l'histoire de la notion, tous types de constructions
confondus, afin de permettre une meilleure appréhension des problèmes
linguistiques posés par cette catégorie fonctionnelle. Trois
regroupements chronologiques structurent l'essai : (i) la naissance de
la notion, des précurseurs de Port-Royal à la grammaire de
l'Encyclopédie, (ii) la description de l'apposition dans la grammaire à
visée pédagogique, de Silvestre de Sacy à la nomenclature grammaticale
de 1975, (iii) la situation de la notion dans la recherche linguistique
française au XXe siècle et dans ses applications descriptives. La
deuxième étude ("Syntaxe et sémantique des constructions appositives -
Approche quantitative") est une description approfondie de la
configuration formelle des appositions, ainsi que de leur fonctionnement
sémantique et de leur environnement textuel. On a retenu trois types
syntaxiques pour organiser cette étude de corpus : (i) les constructions
substantives déterminées, (ii) les constructions substantives non
déterminées, (iii) les constructions adjectives. L'enquête statistique a
été convoquée afin d'établir des rapports significatifs entre des
structures syntaxiques, des types sémantiques de prédicats et des
stratégies énonciatives. D'une manière générale, c'est la
surdétermination du plan local par le plan global qui constitue le fil
conducteur de l'analyse. La troisième étude ("Les appositions frontales
et la dynamique communicationnelle -Questions de méthode") est une brève
réflexion méthodologique sur le fonctionnement transphrastique des
appositions. On y examine plus particulièrement le mode de participation
des segments appositifs d'ouverture à la dynamique de la communication.
La question centrale ici débattue est la nature informationnelle de ces
segments (thèmes ou rhèmes secondaires). Sont traités successivement:
(i) le mécanisme incidenciel de l'apposition et l'équipollence illusoire
entre prédicat et rhème secondaires, (ii) les directions à suivre pour
l'analyse fonctionnelle des appositions frontales. La quatrième étude
("Le système appositif comme mode de caractérisation ontologique") situe
les constructions dans une perspective interprétative en examinant leur
traitement au sein d'un discours spécifique : le discours
(auto)biographique sartrien. On émet ici l'hypothèse selon laquelle
au-delà du "stylème" le système appositif apparaît dans le corpus comme
l'opérateur d'une formation discursive complexe, celle du récit de vie
subverti par le discours phénoménologique. L'étude repose sur trois
enquêtes : (i) les marquages lexicaux dans le système appositif, (ii)
les marquages syntaxiques, (iii) les portraits actanciels et la
structure verbale de l'ontologie.
Quelle que soit la diversité qui les affecte en apparence, ces quatre
perspectives sur l'apposition manifestent une indéniable
complémentarité. On a donc cherché ici, sans vain souci d'exhaustivité,
à rassembler ce qui est généralement épars, afin de présenter le
phénomène appositif dans toute sa complexité, c'est-à-dire dans toute sa
réalité.
___________________________
Faits de langue et sens des textes, Paris, SEDES, 1998 (direction de
l'ouvrage).
___________________________
Phrases - Syntaxe, rythme, cohésion du texte, Paris, SEDES, 1999
(direction de l'ouvrage)
___________________________
"Nouvelles recherches sur l'apposition", Langue française, n° 125,
février 2000 (direction du numéro).
Extrait de : "L'apposition : concepts, niveaux, domaines -Présentation"
L'apposition est une catégorie fonctionnelle qui peut être comptée parmi
les plus récalcitrantes de la grammaire traditionnelle. Cela explique
qu'elle soit à la fois méconnue et contestée. Et si dans l'opinion
commune elle paraît encore vouée à illustrer la ligne de partage,
devenue pourtant indistincte, entre grammaire et linguistique, c'est que
son histoire est assez étroitement liée aux développements de
l'Institution scolaire et aux programmes d'enseignement de la langue
française et de la terminologie grammaticale. Redécouverte au siècle
dernier et introduite sur le marché des valeurs métalinguistiques par un
besoin effréné d'étiquetage, confirmée dans son utilité descriptive au
cours de la première moitié du XXe siècle par les nomenclatures et les
ouvrages à visée pédagogique, elle a été poussée sur le devant de la
scène linguistique française de la fin des années cinquante jusqu'au
milieu des années soixante-dix, en raison des problèmes méthodologiques
que sa présence devenue encombrante n'a pas manqué de susciter. A
l'issue de cette période, où elle s'est rapidement constituée en
répartitoire hétéroclite accueillant presque toutes les marges de la
structure argumentale de l'énoncé, l'apposition, comme par un juste
retour des choses, au nom d'un minimalisme fonctionnel que l'on croyait
de bon aloi, a vu encore plus rapidement sa participation à la
description linguistique réduite à l'identification de quelques
constructions jugées atypiques, pour être finalement reléguée une
nouvelle fois aux confins les plus rhétoriques de la grammaire. De ce
mouvement régulier de grammatisation/dégrammatisation, qui reflète assez
bien les préoccupations successives de la discipline, l'histoire de la
notion doit surtout retenir le caractère durablement sous-conceptualisé
de l'apposition. C'est cette conceptualisation lacunaire qu'il convient
aujourd'hui de battre en brèche. L'objectif de ce numéro de Langue
française est de proposer, à la lumière des préoccupations linguistiques
actuelles, de nouveaux modes d'entrée dans cette catégorie, tout en
redéfinissant les seuils de lisibilité et d'opérativité de certains
concepts qui lui sont attachés. Une telle entreprise suppose bien sûr
que soient réunies les conditions épistémologiques d'un état des lieux
de la question, selon une perspective à la fois historique et théorique.
Cette présentation du numéro se donne pour tâche de rappeler qu'elles le
sont à plusieurs titres.
Extrait de : "Quelle syntaxe pour l'apposition ? Les types d'appariement
des appositions frontales et la continuité référentielle"
Cet article propose une présentation de certains des principaux
problèmes du système appositif, en prenant pour cadre d'analyse le mode
de rattachement des constructions frontales à la prédication première,
et le rôle joué par le point d'ancrage du segment détaché dans la
continuité référentielle. Sont donc écartés de l'étude les syntagmes
binominaux (N1N2 : ex. le philosophe Descartes; N1 de N2 : ex. la ville
de Pontoise), que la tradition grammaticale, comme l'a rappelé la
présentation de ce numéro, a longtemps associés à la catégorie
appositive. Cette éviction des tours non détachés ne s'inscrit pas
seulement dans une stratégie de resserrement du champ de l'analyse. Elle
marque la dissociation de deux objets, que je considère, à la suite
d'autres observateurs, comme distincts et hétérogènes, le segment (de)
N2 relevant du mécanisme déterminatif de l'épithèse (voir entre autres,
sur ce point diversement traité : Pignon, 1961; Zemb, 1978; Kleiber,
1985; Wilmet, 1986; Noailly, 1990 et ici même; Forsgren, 1991, et ici
même). Par la notion de frontalité - frontalité prédicative et non
exclusivement phrastique (Neveu, 1998a : 87-88) -, sont soulignées
l'insuffisance descriptive du couple antéposition/postposition, qui ne
prend pas en compte la situation du segment dans l'énoncé, ainsi que la
nécessité d'une ouverture de la réflexion à la dynamique
communicationnelle.
Borner l'étude à la frontalité du système a pour intérêt de faire porter
l'attention sur les niveaux d'analyse de la construction appositive. A
la question, rémanente, de la nature du phénomène grammatical visé par
l'étiquette d'apposition ("fonction" ou "mode de construction ?"), il
est préférable de substituer aujourd'hui celle du type de syntaxe (micro
ou macro) susceptible d'optimiser la notion et de lui conférer une
existence linguistique stable. Renversant ainsi l'ordre attendu de la
problématique, selon lequel il revient à la syntaxe d'interroger les
catégories fonctionnelles et non à ces catégories de tracer les
frontières du domaine syntaxique, on vise à sortir la problématique
appositive du seul cadre phrastique, tout en maintenant dans la
métalangue un concept qui, pour mal taillé qu'il paraisse, n'en est pas
moins indispensable à la description grammaticale, comme en témoigne son
histoire puisqu'aucune notion n'a pu lui être substituée durablement de
manière opératoire. Mais ce renversement ne prend sens que si on place
l'étude sur le terrain de la comparaison du type et de l'occurrence, en
l'ouvrant aux structures variantes et aux difficultés méthodologiques
qu'elles peuvent engendrer. C'est donc dans ce cadre que s'inscrit le
présent article.
___________________________
Lexique des notions linguistiques, Paris, Nathan, coll. "128", 2000.
Pour celui qui s'initie à la discipline, la linguistique est d'abord un
problème de mots. Des mots qui échappent en permanence à
l'interprétation, soit en raison d'une trop grande technicité et d'une
forme qui ne laisse rien apparaître de la valeur, soit parce qu'issus du
langage ordinaire leur trompeuse familiarité semble indiquer une
perspective qui se révèle à l'usage erronée.
Que signifient les mots classifiance, diathèse, implicature, indexical,
méronymie, prédicativité, subduction ? Qu'est-ce qu'un sémème ? En quel
sens faut-il entendre des expressions comme désignateur rigide, morphème
zéro, référent opaque ? Quel peut être l'emploi des mots saillance ou
saturation ?
Il n'y a bien sûr dans ces énigmes sémantiques rien qui soit spécifique
à ce domaine de connaissances. La philosophie, la science juridique ou
physique, par exemple, sont également productrices d'une technologie
lexicale et conceptuelle foisonnante, dont la part d'ombre ne semble pas
moins impénétrable au néophyte. L'expérience de l'enseignement
linguistique conduit à cette certitude que la difficulté présumée de la
discipline, du moins dans sa phase d'initiation, est surtout le fait
d'une approche réflexive systématisée de la langue qui intervient trop
tardivement dans la formation. La linguistique est ainsi à l'Université
un éveil au métalangage qui, légitimement, suscite tout à la fois dépit
et vocations.
Ce lexique a été conçu pour faciliter cette découverte et aider au
travail d'information de l'étudiant confronté à une bibliographie
abondante et parfois d'accès incommode. Sont réunies environ 200 notions
fondamentales, empruntées à des domaines très divers des sciences du
langage, et susceptibles de se prêter à de nombreuses applications dans
les cursus de langues et de lettres.
On a privilégié les notions descriptives, laissant à d'autres ouvrages
le soin de présenter, le cas échéant, les théories et les écoles.
Au terme de chaque entrée sont proposés des renvois à certains articles
du glossaire destinés soit à l'explicitation d'une notion, soit à
l'approfondissement d'un domaine. Ce qui permet d'établir, derrière
l'ordonnancement alphabétique de l'ouvrage, des regroupements notionnels
cohérents. Mais les définitions et les descriptions ont été conçues de
manière à former des unités autonomes.
___________________________
Des noms - Nomination, désignation, interprétations, Paris, SEDES, 2000
(direction de l'ouvrage)
Extrait de la présentation
Comme le suggère le titre de l'ouvrage, on a donné la priorité aux
entrées sémantique, référentielle et rhétorique pour entreprendre
l'exploration nominale de ces textes. Toutefois, la réflexion s'est
ouverte également à des perspectives morphosyntaxiques conduisant à
étendre cette exploration à l'ensemble de ce que la grammaire
traditionnelle décrit sous la rubrique de groupe nominal, à savoir les
noms, les déterminants, les modificateurs adjectivaux et prépositionnels
du nom, et ses substituts pronominaux.
Dans la plupart de ces études, on voit d'ailleurs prendre forme, étayée
par la matérialité des textes du corpus, une approche critique des
catégorisations du discours les plus usuelles qui servent de fondement à
notre représentation de la langue, qu'il s'agisse de la version
"morphologiste" contemporaine de la théorie des partes orationis, ou de
la partition aristotélicienne entre la substance et l'accident, entre la
nomination et la prédication. C'est effectivement un des intérêts
majeurs de la linguistique de corpus que de faire régulièrement saillir
quelques points de résistance méthodologique à la description des
langues, que d'encombrants concepts viennent trop fréquemment occulter.
On pensera bien sûr à cette fausse discontinuité entre nomination et
prédication, dont témoignent par exemple la structure interne de
certains syntagmes nominaux et la position détachée de certains autres,
ou bien encore à la fonction de mémoire discursive des désignateurs, qui
les détourne d'une trajectoire illusoirement extralinguistique. Qu'une
langue n'est pas faite pour décrire le monde, mais pour l'interpréter,
c'est-à-dire pour le penser et le construire, voilà ce que l'observation
de la vie textuelle des noms nous permet de garder à l'esprit, et ce
qu'illustrent exemplairement les oeuvres littéraires.
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{FR, 17/01/2001}
Cours universitaire de littérature générale
Je vous remercie grandement, ai-je dit tout d'abord à mes étudiants pour
les flatter, de vous être inscrits si nombreux à mon cours. Le thème que
nous allons étudier est en effet très pertinent. Car c'est le plus
ambigu... et son caractère polyphonique témoigne des tensions -j'insiste
sur ce terme- que le texte fait subir aux multiples instances
énonciatives... Car elles sont multiples ! Les renversements auxquels
donne lieu le jeu des contrastes permettent la constitution d'une
structure très élaborée qui combine d'une façon particulière des motifs
eux-mêmes polysémiques. C'est cette combinatoire qui va être l'objet de
mon discours. (Les élèves grattent rapidement et regardent les uns sur
les autres pour essayer de prendre tout en note.) Vous voulez que je
reprenne ? Non ?... Bien. Je poursuis. Elle constitue, la combinatoire,
un réseau dont l'agencement complexe fait intervenir différents niveaux
d'interprétation. Au niveau de la syntaxe, par exemple, une étude des
marqueurs -vous devez tous savoir ce qu'est un marqueur, je ne m'arrête
pas sur des problèmes terminologiques, vous vous reporterez aux ouvrages
dont je vous ai donné les références en début d'année dans les
vingt-cinq pages de bibliographie... Où en étais-je ? Ah ! oui, les
marqueurs... Eh bien, ces marqueurs, ils nous révèlent de façon
surprenante la modalité intersubjective qui caractérise notre sujet !
Intersubjectivité que l'énonciation particulière, je dis bien
particulière, met nettement en valeur (et non en exergue). Un exemple :
à la ligne trente trois, la prédicativisation du thème, autrement dit,
pour les rhumatisants terminologiques, la rhématisation du thème,
n'est-ce pas ? vous révèle de toute évidence l'ambivalence du narrateur
narrant à l'égard du narrateur narré. C'est clair ?... Ou pour parler
votre langage de lycéens attardés, celui qui parle, là, il aime et il
n'aime pas celui dont il parle, qui n'est autre que lui-même quinze ans
plus tôt. Vous me suivez ? Bon ! Faites un effort, ça se complique. Tout
ce montage, véritable labyrinthe structural et linguistique -ne notez
pas, ne notez pas cela, une simple métaphore didactique- toute cette
construction plurielle -ça, vous pouvez noter- cette pluralité a à voir,
c'est ce que l'on finit par découvrir, avec un non-dit subtil et jamais
atteint -car vous avez tous remarqué qu'il s'agit là d'une quête, qui
bien sûr n'en est pas véritablement une- a donc à voir avec un
indicible... que Lacan aurait nommé : l'un en moins. De ce vide entre le
dit et l'objet de cet implicite suggéré avec une rare finesse, naît
l' "inquiétante étrangeté", l'Unheimlich. Vous aurez donc remarqué le
cheminement que j'ai suivi, et qui nous amène à dire que ce texte est un
texte fantastique... Ce qui n'était clair pour personne, maintenant, je
l'espère, l'est pour tous. Des questions ?... Je continue... Nous
entrons maintenant dans la "mise en abyme"... L'esthétique dominante est
celle de l'ambigu. Tout le monde aura remarqué que tout ici est
ambigu... N'est-ce pas ?... Il est clair que l'obscurité participe du
phénomène d'angoisse auquel vous êtes en proie à l'idée que c'est sur le
cours auquel vous assistez en ce moment que portera le prochain
partiel... De quoi est-il question ? Comment une telle complexité
est-elle possible ? Vous conviendrez donc avec moi que le mystère dont
s'entoure l'actualisation de ce thème laisse ouvert tous les
possibles... Comme le disait si poétiquement, Barthes je crois, "le vide
est une polysémie exacerbée". (Murmures d'approbation.) N'est-ce pas ?
Il est clair aussi que ce topos n'éclaire pas l'ethos en principe
toujours nettement visible dans l'incipit. Le sujet de l'énonciation se
dissimule derrière un référent qui n'existe pas. Ainsi, par un subtil
jeu de cache-cache, l'on ne sait ni où l'on est, ni en quel temps, ni
même de quoi l'on parle !... On erre dans un univers flou qu'un
narrateur extra-homo-diégétique en focalisation externe... oui !
homodiégétique en focalisation externe ! car il s'agit d'un narrateur
amnésique et dédoublé... D'où le thème du double entre les deux
narrateurs dont je vous ai parlé tout à l'heure... Vous le voyez, le
fantastique, là ? Eh bien, ce narrateur extra-homo-diégétique (allez
voir Genette pour ça), il observe comme vous ce qui se passe et écoute
ce qui se dit en essayant de saisir quelque chose. On pourrait voir là
une nouvelle vague du Nouveau Roman : l'aboutissement d'un projet qui
semblait une aporie, et dont la forme féminine en clair-obscur que je
vous ai décrite, effrayante et désirable, laisse percevoir sous le voile
du flou artistique, l'érotique robe grillée. (Murmures admiratifs.) La
permanence de l'irréalité que tous nous ressentons est engendrée par
l'illusion d'une présence transcendante que recouvre l'immanence des
mots prononcés devant vous, insaisissables, invisibles, purs signifiants
sur lesquels nous essayons tous en cet instant tragique de mettre au
moins un signifié, une sorte de généralité signifiante globale, vaste et
suprême consécration du chef-d'oeuvre : l'ambiguïté. (Applaudissements.)
Je... (Il ne peut parler.) je v... (Applaudissements accrus.) merci,
merci... Je vous en prie... merci...
Auteur : Frédéric Gobert.
Extrait de : Bande de stylistes ! -Molière, Sade, Proust, Céline, Duras,
et autres pastiches ou parodies, Panormitis, Paris, 1999.
NB : Pour commander l'ouvrage :
- Une commande à
panormitis@free.fr
permet un envoi franco de port sous 24 heures avec une facture à
acquitter à réception des ouvrages.
- Liste des librairies dépositaires et autres informations sur le site
http://panormitis.free.fr
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{FR, 17/01/2001}
POINT DE VUE :
Humanités et sciences humaines
Dans une récente conférence à l'Université de tous les savoirs,
intitulée "Les humanités ou la critique de la spécialisation", Marc
Fumaroli affirmait, à propos du marxisme, défini comme "la première des
sciences humaines" : "Le démenti infligé au marxisme a ébranlé
directement la crédibilité de toutes les autres "sciences humaines"
apparues dans son sillage ou refondues à son exemple [...] Ni le
structuralisme, fondé sur une linguistique qui a révélé assez vite ses
limites, ni l'histoire des mentalités impersonnelles, aujourd'hui
désarçonnée et divisée contre elle-même, ni l'anthropologie, elle aussi
émiettée en spécialités qui n'osent plus se livrer à de vastes
généralisations, pour ne rien dire de la sociologie, n'ont été épargnées
par le soupçon qui ronge le concept même de "science", appliqué à
l'étrangeté radicale du sujet humain concret." (Le Monde, 21.11.2000,
p. 16).
Il reste donc un grand et bel esprit pour croire que les sciences
humaines sont politiquement suspectes. Cette certitude fut hélas naguère
si bien partagée par tous les régimes totalitaires, dont ceux qui se
recommandaient du socialisme réel, qu'ils se sont empressés de les
interdire ou de les réduire, au prétexte qu'elles auraient été des
sciences bourgeoises - ou bolchevisées.
Et cependant, elles seraient à l'origine des massacres qui ont
ensanglanté ce siècle. Si l'on ne peut que stigmatiser les "carnages et
les désastres", notre érudit Professeur est-il bien fondé à les mettre
au compte d'un "pédantisme mégalomane" ? Les pédants, vous dis-je, sont
la cause de tous les maux de l'humanité -et des humanités. Pourquoi ne
pas prendre de libertés avec l'histoire, ce n'est après tout qu'une
science humaine...
Les humanistes de la Renaissance, dont se réclame notre académicien,
sont de fait les véritables initiateurs des sciences humaines :
histoire, philologie, archéologie, anthropologie, linguistique, etc.
Par exemple, les humanités sont-elles si loin des sciences du langage ?
Faut-il rappeler ce texte célèbre de Politien ? : "Les grammairiens
doivent, en fait, expliquer et interpréter tout genre d'écrivain, les
poètes, les historiens, les philosophes, les médecins, les
jurisconsultes. Notre époque, qui s'y connaît si peu dans les choses
anciennes, a relégué dans un cercle étroit le grammairien ; mais, auprès
des Anciens, cet ordre avait tant d'autorité qu'ils (i.e. les
grammairiens) étaient les seuls censeurs et juges de tous les écrivains,
si bien qu'ils étaient également appelés 'critiques'. Ainsi, comme le
dit Quintilien, ils ne se permettaient pas seulement de marquer les
passages dignes de censure avec de petites virgules, mais aussi
d'éloigner de la famille, tels des enfants illégitimes, les livres
apocryphes ; bien plus, ils décrétaient, à leur guise, ceux qui
faisaient partie de l'ordre des auteurs, et ceux qui en étaient exclus.
En effet, grammairien ne signifie rien d'autre en grec qu'homme de
lettres en latin" (Lamia, 1492 ; texte latin in Opera, I, Turin, La
Bottega d'Erasmo, 1971, p. 460.)
* * *
En France, la séparation entre les lettres et les sciences a été et
demeure plus sévère qu'ailleurs. Cuvier, pourtant peu suspect
d'effusions littéraires, la déplorait déjà : "On raisonne toujours comme
si la science excluait la littérature, ou même s'il était possible qu'un
savant ne fût pas lettré. Proposition absurde ! les connaissances
appelées littérature sont une condition nécessaire de tout progrès réel
des sciences". Les lettres ont été frappées par le rigorisme
antirhétorique des Lumières, et c'est au nom du progrès que les arts du
langage ont été sacrifiés à la déesse Raison : sous la plume de
d'Alembert, l'Encyclopédie ne traite de la rhétorique qu'à l'article
Collège, pour la réduire à des "puérilités pédantesques". Le cursus
révolutionnaire supprime la rhétorique des matières d'enseignement, au
moment même où l'on crée cet idiome moderne hélas impérissable qu'est la
langue de bois - ce que devient l'éloquence privée de ses dimensions
critique et éthique.
Le contenu de l'enseignement de la rhétorique sera réparti entre la
Grammaire générale et raisonnée -déjà cognitive, puisqu'elle se propose
"l'analyse des sensations, des idées et des jugements, et des moyens de
les exprimer avec exactitude" et les Belles-Lettres réduites à la
lecture sensible d'oeuvres littéraires (Marmontel). Nous n'en sommes
encore pas si loin, l'avant-gardisme académique a simplement débordé le
sensible par le pulsionnel.
Cette séparation est redoublée par la séparation entre les Lettres et
les Sciences. Le ministre Fortoul, créant en 1852 le Baccalauréat ès
sciences, déclarait : "Il serait chimérique de vouloir imposer aux
esprits ordinaires, qui forment la majorité, l'obligation de mener de
front les études scientifiques et les études littéraires". En 1989,
bicentenaire de la Révolution française, un autre ministre prononçait
l'interdiction de fait, pour les élèves préparant un baccalauréat
scientifique, d'étudier le latin. Le scientisme jacobin et le
spiritualisme de la vulgate romantique s'accordent ainsi à créer deux
"cultures opposées", là où il n'y en a jamais eu qu'une.
Transposée dans le domaine propre des lettres, cette fausse querelle
remet indéfiniment en scène un conflit moliéresque entre les honnêtes
gens et les pédants, ou pire encore, les spécialistes. Les sciences du
langage n'ont jamais eu bonne presse dans l'establishment littéraire :
souvenons-nous des éloges assassins de Jean Hytier à Leo Spitzer. Le bon
ton académique s'offusque de l'érudition, s'effare de la technicité,
surtout quand elles osent s'acoquiner avec l'enthousiasme intellectuel.
De nos jours encore, au sein des disciplines littéraires, la séparation
entre linguistique et littérature semble insurmontable à certains, comme
si la littérature n'était pas un art du langage. Antoine Compagnon
affirme ainsi : "Historicisme et formalisme réduisent la littérature à
la non-littérature : l'histoire et le langage" (Dictionnaire des genres
et notions littéraires, 1997, Paris, Albin Michel, p. 417, s.v.
Critique). Ce geste de refus se répète régulièrement : le pamphlet de
Pavel, Le mirage linguistique (1989) conduit à dénoncer dix ans plus
tard Le Démon de la théorie -et à faire L'éloge du sens commun (cf.
Compagnon, 1999).
Le préjugé académique devenu sens commun s'appuie notamment sur le
conformisme nécessaire aux concours. Alors que l'agrégation a été fondée
sous Louis XV pour pallier l'expulsion des Jésuites, depuis sont
apparues maintes disciplines "sans concours" comme la linguistique,
l'anthropologie, la psychologie ou la sociologie. Leur place dans les
études littéraires reste naturellement fort discrète.
La critique cependant s'est bien accommodée d'une confortable
indigence : ayant négligé sa dimension critique à l'égard de son objet
comme à son propre égard, elle ne trouve ni son objet, ni
corrélativement son langage, car elle ne parvient pas à définir la
distance qui les sépare. Elle devient alors un discours littéraire,
quelque peu fusionnel, sur la littérature, qui culmine dans le Rimbaud,
le fils, de Pierre Michon, bon roman dont le personnage principal se
prénomme Arthur. En temps ordinaire, elle s'étend sur les monotones
idéalités qui ont remplacé les textes : la Littérarité, le Style, le
Lecteur, l'Auteur, l'Inconscient du texte, l'Intertexte, le Corps -
simple inversion de l'Esprit absolu.
Au principe de plaisir critique, j'opposerais volontiers un principe de
réalité philologique. Entre deux éditions d'Hérodias, j'ai compté pour
les six premières phrases douze différences, tant de ponctuation que de
lexique. Nous nous repaissons de légendes, et par exemple Flaubert n'a
jamais dit ni écrit : "Madame Bovary, c'est moi".
En matière de langage, par bonheur, les créateurs -pourquoi ne pas les
écouter ?- ont toujours été moins prudes que les critiques. Au rappel
que Mallarmé adressait à Degas : "ce n'est pas avec des idées qu'on
écrit des poèmes, c'est avec des mots", ajoutons : "La littérature est,
et ne peut être considérée comme autre chose qu'une sorte d'extension et
d'application de certaines propriétés du langage" (Borges, OC, I, 1154).
Aussi les sciences du langage ont-elles leur mot à dire, sans prétendre
porter de jugements esthétiques. Prenons pour exemple l'opposition
humboldtienne entre 'forme intérieure' et 'forme extérieure'. Dámaso
Alonso fondait sur elle la distinction entre le 'poétique' et le
'poématique' ; le courant désirant l'a utilisée pour opposer le 'sens' à
une mystérieuse 'signifiance'. Chaque fois, il s'agissait de dépasser la
description des formes linguistiques, qui n'aurait été qu'objectiviste.
Les formes littéraires semblaient en attente d'une signifiance, qui leur
aurait été infusée antérieurement par des sentiments, des pensées ou un
inconscient dont elles seraient la traduction, et qu'il conviendrait de
lire, en réintroduisant la théorie émotionnelle de la création et
l'empathie de l'herméneutique post-romantique. L'oeuvre culminerait dans
l'homme, la langue dans le style, la forme extérieure dans une forme
intérieure.
Et si la forme intérieure n'était que la part non encore décrite de la
forme extérieure ? Le poids de la tradition logico-grammaticale dans les
sciences du langage les a certes conduites à négliger des formes
d'organisation des textes, comme les inégalités qualitatives, les
rythmes tant sémantiques que phoniques, etc. Mais dès lors qu'elles
revendiquent leur place dans une sémiotique des cultures, elles doivent
rendre compte, à leur niveau d'analyse, de ces qualités restées
mystérieuses.
L'étude des langues et celles des littératures se complètent à
l'évidence. En définissant la grammaire, Denys le Thrace, ce philologue
sans doute élève d'Aristarque qui codifia notre tradition grammaticale,
fait culminer la grammaire dans la critique des poèmes, qui en est "la
plus belle part" (Technè grammatikè, I,1).
À la Renaissance, grâce notamment à Valla, Politien, Vivès, Erasme, les
humanités deviennent indissociables des sciences du langage sommées dans
la philologie.
Enfin, le projet même d'une histoire comparée des littératures se forme
dans l'Allemagne romantique en étroite liaison avec la linguistique
historique et comparée : Friedrich Schlegel comme Wilhelm von Humboldt
en témoignent, on ne peut évidemment faire l'histoire des langues sans
faire l'histoire des textes qui les concrétisent, les établissent, voire
les créent.
* * *
Le Dieu créateur s'étant dit-on absenté, il fut peu à peu suppléé par
les artistes, qui, d'honnêtes artisans, devinrent ces démiurges qui
pullulent désormais. La désacralisation des Ecritures, leur
objectivation par la philologie, furent compensées par la sacralisation
de la Littérature.
Tout ce qui peut objectiver la littérature, en faire un corpus digne
d'études critiques, soumis à débats et conjectures, apparaît donc comme
un sacrilège rampant. Tant qu'on reste dans le commentaire plus ou moins
dévotionnel, tout va bien ; mais dès lors qu'on s'avise de scruter la
lettre, qu'on ose sortir de l'espace de l'oraison académique, qu'on
s'appuie sur des tableaux, des figures, pire encore des chiffres, tout
n'est plus que jargon. D'ailleurs les revues d'études littéraires ne
publient pas de hors-texte, sinon des illustrations comme la photo de la
maison de Madame Bovary ou ces attendrissantes gravures qu'elle aimait
tant.
Quand au nom des humanités on répète que l'homme est ineffable et ne
saurait devenir objet de science, qu'on vilipende les sciences humaines
au nom du Sujet -en fait de l'Ego-, ne risque-t-on pas de se laisser
aller à une superstition narcissique ?
François Rastier
lpe2@ext.jussieu.fr
N.B. Une première version de ce texte est parue sur la liste Lalif
(Langue et littérature française) vol 1, numéro 1.
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COLLOQUE INTERNATIONAL
Saussure après un siècle
23-27 JUIN 2001
PROPOS DU COLLOQUE
Après un siècle, Ferdinand de Saussure reste énigmatique. Cette énigme
se nourrit de l'histoire singulière d'une réception : la pensée
saussurienne aura été connue, reconnue, interprétée, critiquée, en un
mot assimilée par l'histoire des idées, bien avant d'être découverte
dans ses textes originaux. Schématiquement, les deux premiers tiers du
XXe siècle ont été profondément marqués par la réception du Cours de
linguistique générale, alors que le dernier tiers du siècle aura été
celui de la réception progressive d'un héritage retardé : celui des
textes originaux qui sous-tendent le célèbre Cours, ainsi que de
nombreux autres textes, notes, brouillons, ébauches portant notamment
sur la mythologie et sur la poésie.
Ce n'est peut-être pas tant l'auteur des longues recherches sur les
mythes ou sur les anagrammes poétiques qui sera resté le plus
profondément dans l'ombre. Au contraire, ce qui est longtemps demeuré le
plus méconnu chez Saussure, c'est précisément ce qui semblait le mieux
connu : sa pensée sur la "linguistique générale", cachée qu'elle est
derrière l'ouvrage de linguistique le plus en vue du siècle.
Les textes originaux de la méditation saussurienne sur le langage et sur
sa science, dévoilés et étudiés lentement au cours de la seconde moitié
du XXe siècle, ne sont pas encore lisibles dans leur continuité et
servis par la philologie requise. Leur totalité, peut-être provisoire,
s'est en outre enrichie d'un fonds considérable retrouvé à la fin des
années 1990 lors d'une rénovation de l'orangerie de l'Hotel de Saussure
à Genève.
Tous les textes méritent une attention égale, tant éditoriale que
théorique car toutes les faces d'un Saussure bien évidemment unique se
déterminent et s'éclairent mutuellement. Par exemple, les études sur les
légendes germaniques se préoccupent explicitement du "signe au sens
philosophique". Et il semble évident que les "autres Saussure"
entretiennent un rapport particulier avec le domaine d'une linguistique
de la parole. Enfin, surplombant tous ces Homonymes, il y a le
théoricien d'une "science" -c'est-à-dire en fait d'un point de vue- plus
large que la linguistique : cette "science des signes au sein de la vie
sociale" projetée sous le nom de sémiologie.
S'il est trop tôt pour parler de renaissance, le renouveau procédera
-procède déjà-, comme toujours, de la réception des textes, notamment
ceux des deux éditions (Ecrits de linguistique générale et Leçons de
linguistique générale) qui saluent, dans la Bibliothèque de Philosophie
de Gallimard, l'entrée de la "linguistique générale" saussurienne dans
le troisième millénaire.
Le présent colloque a pour but de présenter des témoignages
documentaires divers -philologiques, biographiques, bibliographiques,
iconographiques- sur Ferdinand de Saussure, mais, plus encore, de
demander à des penseurs d'horizons divers leur témoignage personnel, qui
prendra peut-être la forme d'une réponse à cette interrogation : comment
leur lecture d'une réflexion appartenant au précédent "tournant du
siècle" a-t-elle accompagné les avancées de leur propre pensée?
PROGRAMME (AU 31 DECEMBRE 2000)
SAMEDI 23 JUIN
(journée organisée avec la collaboration de Patrick Sériot)
SECTION I. Ferdinand de Saussure, 1878-2001 ... textes et réceptions
Conférences
Rudolf Engler / Simon Bouquet (Berne/Paris) :
La linguistique saussurienne : histoire de textes
X* : Le saussurisme en Suisse au XXe siècle
Michel Arrivé (Paris) : Le saussurisme en France au XXe siècle
Ludwig Jäger (Allemagne) : Le saussurisme en Allemagne au XXe siècle
Daniele Gambarara (Italie) : Le saussurisme en Italie au XXe siècle
Terence Gordon (Canada) :
Le saussurisme en Angleterre et aux Etats-Unis au XXe siècle
Patrick Sériot (Lausanne) : Le saussurisme en Russie au XXe siècle
Akatane Suenaga (Tokyo) : Le saussurisme au Japon au XXe siècle
DIMANCHE 24 JUIN - MERCREDI 27 JUIN
SECTION II. Sémiologie saussurienne et philosophie des sciences humaines
Dimanche 24 juin (après-midi) - Lundi 25 juin (matin)
1. Conférences
Jean-Paul Bronckart (Genève) :
L'analyse du signe et la genèse de la pensée consciente
Jonathan Culler (New York) : L'essentiel de l'arbitraire
Roy Harris (Oxford) :
L'écriture: pierre d'achoppement pour la sémiologie saussurienne
François Rastier (Paris) : Le silence de Saussure et l'ontologie refusée
Carol Sanders (Guilford) : Saussure, penseur de la fin du siècle?
2. Tutorial
3. Groupe de discussion
SECTION III. Aux fondements d'une science de la langue
Lundi 25 juin (après-midi) - Mardi 26 juin (matin)
1. Conférences
Marie-José Béguelin (Neuchâtel) :
La langue et la didactique saussurienne
Gabriel Bergounioux (Orléans) : Des traits phonétiques chez Saussure.
Un débat avec les néo-grammairiens
Alain Berrendonner (Fribourg) : Système et variations
Jacques Coursil (Martinique) : Une science des 'valeurs pures'
Claude Hagège (Paris) : *[titre précisé ultérieurement]
Herman Parret (Louvain) : Sémiotique de la voix et son temps
dans les manuscrits de Saussure
2. Tutorial
3. Groupe de discussion
SECTION IV. Linguistique(s) de la parole
Mardi 26 juin (après-midi) - Mercredi 27 juin (matin)
1. Conférences
Yves Bonnefoy (Paris) : Langue et parole : la question de la poésie
Jean-Blaise Grize (Neuchâtel) : Langue et parole, logique et discours
Jacques Geninasca (Neuchâtel) :
De la théorie du signe à celle du formant
Julia Kristeva (Paris) :
Les Anagrammes et l'inconscient : Saussure et Freud
André Green (Paris) : Langue, Parole, Inconscient, Ca. La place de
Ferdinand de Saussure dans la théorie psychanalytique
2. Tutorial
3. Groupe de discussion
COMITE D'INITIATIVE
Simon Bouquet (Université de Paris X-Nanterre)
Simon.Bouquet@ifs.cur-archamps.fr
Marie-José Béguelin (Universités de Fribourg et de Neuchâtel)
marie-jose.beguelin@unifr.ch
Rudolf Engler (Université de Berne)
r.engler@datacomm.ch
François Rastier (CNRS, Paris)
lpe2@ext.jussieu.fr
INFORMATIONS PRATIQUES :
ADRESSE DU COLLOQUE
Institut Ferdinand de Saussure
Centre universitaire et de recherche, 74166 Archamps, France
ifsgenev@ifs.cur-archamps.fr
LIEUX DU COLLOQUE
Les séances se tiendront pour partie à Genève, pour partie au Centre
universitaire et de recherche d'Archamps (French Geneva Campus), qui
offre à quelques minutes de Genève une infrastructure homogène et les
meilleures conditions de confort et de convivialité. L'hébergement
hôtelier est assuré sur le site d'Archamps. Les repas sont pris sur le
site du colloque, sauf deux dîners prévus à Genève. Des navettes
Archamps-Genève sont assurées.
PRÉINSCRIPTION (nombre de places limité)
Envoyez dès maintenant vos coordonnées complètes à :
ifsgenev@ifs.cur-archamps.fr
Vous recevrez début mars un bulletin d'inscription.
TARIF D'INSCRIPTION
Tarif incluant participation au colloque, navettes et repas (midi et
soir) : 1 500 FF (1 200 FF jusqu'au 15/05/2001). Demi-tarif étudiant ou
demandeur d'emploi, sur justificatif.
HÉBERGEMENT
Hébergement sur le campus d'Archamps :
Hôtel Ibis : tél. 04 50 95 38 18
Résidence universitaire "Grand Angle" : tél. 04 50 43 26 00
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