SÉMANTIQUE TEXTUELLE 2

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1. Texte

1.1. Les composantes de la textualité et l’entreprise typologique

1.1.1. Les composantes

Tout texte est articulé autour de composantes.

Une composante est « une instance systématique qui, en interaction avec d’autres instances de même sorte, règle la production et l’interprétation  des suites linguistiques. Pour le plan du contenu, on distingue quatre composantes de la textualité : thématique, dialectique, dialogique et tactique » (FR 94).

Voici les définitions de chacune des composantes :

Thématique : « étude des contenus investis et de leurs structures paradigmatiques » (FR 89). Pour une première idée, l’analyse en champs lexicaux constitue une étude de la thématique du texte (cf. aussi la critique thématique dans les études littéraires).

Dialectique : « composante sémantique qui articule la succession des intervalles dans le temps textuel, comme les états qui y prennent place et les processus qui s’y déroulent » (FR 01). Cela est à rapprocher des théories du récit, de la narrativité en sémiotique, mais ici il s’agit d’une composante de la textualité et non pas de la forme générale de tout texte comme cela a pu l’être en sémiotique.

Dialogique : « composante sémantique qui articule les relations modales entre univers et entre mondes ; sa description rend compte de l’énonciation représentée » (FR 01). Cette composante est donc consacrée à l’étude de l’énonciation (parfois extrêmement complexe, cf. les textes littéraires). Selon F. Rastier, la dialogique fonde la typologie des énonciations représentées ; dans les textes d’instructions techniques, nous avons un foyer énonciatif et un foyer interprétatif non nommés et une suite de phrases à l’impératif ; dans les articles scientifiques, il y a multiplication des énonciateurs délégués (citations, allusions, précision des foyers interprétatifs par des clins d’œil aux initiés) ; la complexité maximale dialogique reste l’apanage de la littérature qui multiplie les foyers énonciatifs sans les hiérarchiser, ni même les signaler (ex. du style indirect libre).

Tactique : « composante qui règle la disposition linéaire des unités sémantiques » (FR 89).

On abordera rapidement et globalement la question de l’interaction des composantes qui débouche sur la problématique des genres et de leur typologie [chantier en cours, à explorer plus spécifiquement au niveau recherche].                 

Ex., pour une notice d’entretien (d’avion ici, cf. p. 215-216 de FR 94), la thématique est fixe ; dans la dialectique, l’inventaire des acteurs est fixe (ni création, ni disparition d’acteurs) ; ils sont présentés en trois groupes (les outillages et ingrédients, les parties de l’avion, les agents présupposés par les infinitifs à valeur jussive : adjuvants, objets, agents) ; fonctions réversibles (déposer/reposer) et à succession ordonnée fixement (indexation par chiffres et lettres) [on peut douter qu’il s’agisse de dialectique, conçue comme narrativité, ici ; on est plutôt, dans cette succession d’actions, dans le cadre d’un type particulier de description portant sur les parties de l’objet à monter/démonter – rôle du type de l’objet] ; la dialogique se caractérise par une prépondérance du factuel, le contrefactuel étant réservé aux notes (« ne jamais employer de produit chloré »), le possible renvoyant à une procédure intercalaire facultative (« effectuer éventuellement… ») ; les foyers énonciatif et interprétatifs sont fixes ; la tactique ne correspond à aucune succession temporelle dans la première partie (outillages et ingrédients), mais à une succession stricte dans la seconde (échange des éléments filtrants), avec des inversions en forme de chiasme (accéder, déposer, reposer, refermer) liées aux phases initiales et finales des processus décrits

Seules la thématique (de quoi est-il question ?) et la tactique (ordre des unités) sont nécessaires dans tout texte : ex. du cas limite de l’énumération (encore que même une énumération puisse comprendre des structures dialectiques ou dialogiques : ex. du « veni, vidi, vici » de J. César, ou du « Brot, Kuss, Ehre » (pain, baiser, honneur) du grognard de Napoléon qui résumait ainsi les avantages de la vie militaire !). Dans le cadre de ce cours, nous nous centrerons sur la composante thématique, ce qui n’indique pas une exclusivité, mais les outils/notions à acquérir à ce niveau sont déjà assez complexes.

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