LE NEVEU DE RAMEAU

Antithèse qui, au cours de ce dialogue romanesque, oppose au cynisme paradoxal de ‘lui’ le rétablissement de la morale doxale par ‘moi’, incarnation du philosophe, qui stigmatise le comportement oisif des mondains.

De là la dépréciation de ‘âme’ ; mais pourquoi pas celle de ‘cœur(s)’ et ‘yeux’ qui restent valorisés ?

On fera observer que dans les extraits précédents cœur et âme étaient sinon parasynonymes, du moins convergents, alors qu’ici le premier se distingue du second ainsi : /leur vacuité/ (‘ennui’) vs /ma plénitude/ (amoureuse).

A ce distinguo s’ajoute un jeu casuel puisque cœur et yeux sont pourvus du cas INSTRUMENTAL dans la mesure où ils ne sont pour le philosophe qu’un moyen pour parvenir au ‘bonheur’ et aux qualités de l’âme, laquelle se trouve ainsi dotée du cas FINAL du fait que c’est le principe moral recherché.

Lien culturel : montrer que ces CAS et l’antithèse reposent sur la thèse à portée globale (dans la satire mais aussi dans l’idéologie du XVIII s. dont ce segment est très représentatif, ce qui fait sa significativité), selon laquelle la sensualité et la sensibilité sont conçues comme un moyen, nécessaire mais non suffisant, pour parvenir au bonheur – la grande affaire du XVIII s. (plaisir contre vertu, ce sera le dilemme repris dans le roman suivant).

La prise de conscience qu’un discours apparemment spontané peut être riche de nuances sémantiques constitue l’enjeu pédagogique de l’analyse.