Volume XXIX - n° 1-2 (2024). Coordonné par Créola Thénault Baltaretu
Saussurismes et sémiotiques
— À la fin de la première décennie du vingtième siècle, quelques années avant sa mort prématurée, le linguiste genevois Ferdinand de Saussure préfigure une nouvelle discipline portant sur l’étude de « la vie des signes au sein de la vie sociale ». Dans ses cours de linguistique générale, il propose d’appeler sémiologie, cette science à venir. À la base de la future Sémiologie, Saussure place les idées d’une linguistique inédite par ses principes, peu nombreux et clairs, et par ses méthodes, simples et efficaces: une linguistique à la Saussure. Qu’en est-il aujourd’hui de la sémiologie à la Saussure ?
Parutions et trésors
— À l’heure où disparaissent les derniers témoins de la Shoah, le livre de Morgan Poggioli repose la question des rapports complexes entre témoignages littéraires et faits historiques. Cet article s’intéresse au choix éthique de l’auteur pour caractériser une époque en retraçant le parcours d’un jeune juif désespéré commettant le premier acte de résistance aux nazis sur le sol français, en 1938. Dans la lignée de la philosophie des Lumières, l’auteur montre que ce choix s’accorde avec la tâche qu’Humboldt avait assignée à l’historien au début du XIXe siècle.
Parutions et trésors
— Préparés par les animateurs de la revue Textualités, ces Mélanges en l’honneur de Jean-François Jeandillou, Professeur émérite en sciences du langage à l’Université Paris Ouest Nanterre, rendent hommage à un enseignant de premier plan, pour son apport décisif à la science des textes, comme pour son engagement pédagogique. La pensée scientifique de ce spécialiste des textes a été marquée par des questionnements théoriques approfondis, et a remis en cause toute logique normative des classifications, qui restreindrait la textualité à des catégories conformes à des exigences disciplinaires, rhétoriques et taxinomiques rigides. L’universalité de la pensée de Jeandillou se reflète dans la diversité des contributions à ce volume, aussi bien au sein des sciences du langage qu’en dehors d’elles.
Repères pour l'étude
— Après avoir rappelé les objectifs pratiques de la recherche scientifique de Karl Bühler, et de la nouveauté de son approche théorique, cette note souligne la récurrente actualité de Karl Bühler : l’ancrage de la psychologie dans la biologie marque un tournant dans l’histoire des sciences; et, ce qui est plus important, son approche non réductionniste des recherches psycho-somatiques. En effet, le postulat de Bühler qu’il n’y a point de perception sans interprétation, est douloureusement pertinent au temps présent où la science semble aveuglée par la naïveté philosophique généralisée qui s’obstine à récuser toute interprétation à force de n’y voir que de la métaphysique. En replaçant la pensée de Karl Bühler dans le cadre de la médecine et de la biologie, cette note engage ainsi à dépasser la vulgate sémiologique qui s’appuie exclusivement sur la première partie de sa Sprachtheorie, pour souligner son actualité remarquable qui rencontre les recherches actuelles sur la communication comme couplage avec l’environnement.
Repères pour l'étude
— Dans cette étude, l’auteur décrit les phases de la difficile publication et réception de l’oeuvre de Gilbert Simondon depuis la date de la première publication partielle de sa thèse (5 janvier 1958) et jusqu’à nos jours. Or, la difficile réception de l’œuvre de Simondon n’est pas sans lien avec les discontinuités et les lacunes de l’histoire éditoriale de ses écrits. À cela on ajoute la difficulté de traduire et de lire son œuvre; une traduction et une lecture à la fois partielles et partiales, pour enfin arriver à la récente publication (2005, L’individuation à la lumière des notions de forme et d’information, Grenoble, Éditions Jérôme Millon) et à la diffusion internationale de l’ensemble de l’œuvre et de l’originalité de la pensée de Simondon, après notamment le colloque international de Cerisy la Salle (2013) et grâce aux efforts soutenus du Centre international des études simondoniennes.
Parutions et trésors
— Pourquoi un texte ne se réduit-il pas à une suite de phrases? Quelle continuité trouver entre le sens d’un texte et les significations de ses unités? Par quel biais décrire les thèmes, les moments d’un récit? Appuyé sur une sémantique de l’interprétation, cet ouvrage entend proposer des réponses à ces questions et détaille une méthode descriptive. Elle est mise à l’épreuve sur des analyses de textes littéraires, de Jodelle à Zola et de Mallarmé à Apollinaire. Ainsi ce livre plaide-t-il par l’exemple pour une alliance renouvelée entre la science des texte et l’art du langage.