2008_07_11
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SdT volume 14, numero 2.
                        LA CITATION DU MOIS
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            Les genres littéraires sont des ennemis 
            qui ne vous ratent pas,
            si vous les avez ratés au premier coup.
                Henri Michaux, L'espace du dedans
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                SOMMAIRE
1- Presentations
    - Bienvenue a nos 9 nouveaux abonnes, dont Estanislao Sofia,
      Eric Trudel, et Olfa Abdelli.
2- Textes electroniques
    - Le Littre.
3- Publications
    - Francoise Canon-Roger et Christine Chollier :
      "Des genres aux textes : Essais de sémantique interprétative
       en littérature de langue anglaise".
    - Texto! : nouveautes de la derniere edition (XIII, 1/2).
    - Actes des JADT 2008.
4- Textes
    - Mathieu Valette : "Pour une science des textes instrumentee".
    - Francois Rastier : "Lettre sur Saussure".
5- Appels : Colloques et revues
    - "Le Monde du Symbolique -en hommage a Claude Levi-Strauss"
      Colloque international, Paris, 21-22 novembre 2008.
    - "Enonciation et rhetorique dans l'ecrit scientifique"
      Numero 41 de LIDIL, sortie prevue juin 2010.
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[informations réservées aux abonnés]
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Textes electroniques Textes electroniques Textes electroniques Textes
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{FR, 02/07/2008}
BEAUX SITES
Framasoft signale sur son site la sortie d'un logiciel libre (licence
GPL) qui permet d'avoir sur son ordinateur le Dictionnaire de la Langue 
Française, d'Emile Littré, qui lui vaut d'être connu sous le nom "Le 
Littré". Il s'agit de la version originale de ce dictionnaire. 
Comment utiliser le Littré ? 
en ligne : http://francois.gannaz.free.fr/Littre/accueil.php 
téléchargeable sur son ordinateur :
    http://code.google.com/p/dictionnaire-le-littre/ ou encore
    http://francois.gannaz.free.fr/Littre/horsligne.php 
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Publications Publications Publications Publications Publications
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{FR, 03/07/2008 et Chollier, 11/07/2008}
VIENT DE PARAÎTRE
            Des genres aux textes :
        Essais de sémantique interprétative
        en littérature de langue anglaise
Françoise Canon-Roger et Christine Chollier
Cet ouvrage présente dix études sur la détermination des textes par 
leur genre. Ces études portent à chaque fois sur un texte de 
littérature irlandaise et sur un texte de littérature nord-américaine. 
Elles s'inspirent d'une hypothèse formulée par la Sémantique des Textes 
et elles la mettent à l'épreuve des oeuvres. Une fois construite, la 
détermination des textes et des passages par le genre dont ils relèvent 
mène à leur spécificité. L'influence du niveau global (genre ou texte) 
sur le local (texte ou passage) n'empêche en aucun cas l'action 
rétroactive du passage sur le texte entier : le "passage" est donc un 
point d'accès au texte dans la mesure où le global passe par lui.
Artois Presses Université
Collection "Lettres et Civilisations étrangères"
ISBN : 978-2-84832-073-1 - 2008. Broché, 16x24, 368 pages, 25 euros.
    http://www.univ-artois.fr/francais/apu/collections.html
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{FR, 02/07/2008 et Gérard, 07/07/2008}
TEXTO! http://www.revue-texto.net
Vient de paraître en juin 2008 : vol. XIII, n°1/2
Numéro coordonné par Christophe Gérard. 
 
Dans la rubrique DITS ET INÉDITS :
François RASTIER
    Passages
Cet article précise le concept de passage par l'examen des rapports 
entre son contenu et son expression, comme par l'étude des rapports 
contextuels au sein du passage et entre passages.
Michel GAILLIARD
    Justine chez Dubourg : lecture isotopique d'une scène sadienne
Construction d'une isotopie libertine par présomption dans un passage 
de Sade.
François RASTIER
    Croc de boucher et rose mystique 
    Enjeux du pathos sur l'extermination 
Absent ou presque de la littérature de l'extermination (Levi, Antelme, 
notamment), le pathos abonde dans des essais sur l'extermination. Après 
en avoir évoqué la généalogie, on en rappellera les procédés et formes 
récurrents, aussi bien chez des auteurs comme George Steiner et Giorgio 
Agamben que chez leurs inspirateurs, Heidegger notamment. Dans le 
discours théologico-politique qu'ils articulent, une grandiloquence 
irrationaliste unit politique et mysticisme. Le pathos sur 
l'extermination semble ainsi pris dans le système des valeurs 
d'exaltation qui l'ont permise ou accompagnée, pour autant qu'elle 
témoigne de l'irruption du mythe dans l'histoire.
Dans la rubrique DIALOGUES ET DÉBATS :
Gabriel BERGOUNIOUX
    Une de mes Amours, un de mes travails
Dans cet entretien réalisé pour la revue Penser / rêver en 2006,
Gabriel Bergounioux présente "Lacan débarbouillé", ouvrage dans lequel 
il propose, à partir d'une analyse philologique et linguistique, un 
rétablissement du texte de séminaires de Lacan lui paraissant 
fautivement transcrits. Au passage, il sera question de parole 
intérieure, de Saussure, d'interprétation...
Jean-Paul BRONCKARDT
    Genres de textes, types de discours et "degrés" de langue
    Hommage à François Rastier
Dans un hommage à François Rastier en forme de débat, Jean-Paul 
Bronckart revient sur les concepts de "texte", "genre" et
"discours" pour examiner les points de rencontre, et les divergences, 
entre sémantique textuelle et interactionnisme socio-discursif.
François RASTIER, Valentin TEMKINE et Pierre TEMKINE
    En attendant Godot : de l'absurde à l'histoire
En s'appuyant sur une relecture détaillée de En attendant Godot, 
Valentin Temkine produit une interprétation globale renouvelant la 
lecture de la pièce : à rebours des interprétations selon les canons du 
"théâtre de l'Absurde", il restitue la pièce à l'Histoire en 
explicitant les thèmes latents de l'Occupation et de la Shoah. Le 
dialogue entre Valentin et Pierre Temkine est suivi de trois réactions.
Dans la rubrique PARUTIONS ET TRÉSORS :
Baptiste FOULQUIÉ 
    Compte rendu critique de Semen, n° 23, Avril 2007 
Etat des lieux et mise en perspective du dialogue entre sémiotique et 
communication.
Christian BOTA
    Eugenio Coseriu : linguistique et philosophie du langage,
    un modèle complexe du fonctionnement langagier
Dans ce texte d'introduction à la traduction et la publication en 
italien d'une anthologie de textes d'Eugenio Coseriu consacrés à la 
philosophie du langage, Cristian Bota présente le parcours intellectuel 
et les positions épistémologiques et gnoséologiques du linguiste.
Jean LASSÈGUE (dir.)
    Émergence et évolution de la parenté 
Actes d'un colloque comprenant :
Jean LASSÈGUE - Présentation ;
Camilla POWER - Biological substrates of human kinship : the view from 
life history theory and evolutionary ecology ;
Chris KNIGHT - Revisiting matrilineal priority ;
Nick ALLEN - Tetradic theory and the origin of human kinship systems.
Dans la rubrique LA LETTRE ET L'INTERPRÈTE :
Pierre Judet DE LA COMBE
    Sur les conflits en philologie
Fil conducteur pour la compréhension de son histoire, le caractère 
conflictuel de la philologie conduit à revenir sur les choix de la 
méthode et la logique des interprétations.
Jean GRONDIN
    Hermeneutics
Paru dans le Dictionnary of the History of Ideas (2005), cet article 
effectue un parcours synthétique des figures et concepts marquants de 
l'herméneutique contemporaine.
Dans la rubrique SAUSSURE ET SAUSSURISMES :
Maurice GRAMONT 
    Compte rendu du Cours de linguistique générale 
Publié dans la Revue des langues romanes, 1966, n°59, p. 402-410.
Antoine MEILLET
    Compte rendu du Cours de linguistique générale 
Publié dans le BSL, 1916, t. XX, p. 32-36.
Rossitza KYHENG 
    Entité première - Identité des objets concrets 
    Édition diplomatique des feuillets 255-256 des manuscrits
    saussuriens (inédits) 
Maurice GRAMONT
    Compte rendu des Mélanges linguistiques offerts à M. Ferdinand 
    de Saussure 
Publié dans la Revue des langues romanes, 1912, n°55, p. 387-389.
Rossitza KYHENG
    Comment a été conceptualisé le terme de "parole" ? 
Édition génétique du feuillet 176 des manuscrits saussuriens
(correspondant à la section 17 [Parole effective et parole potentielle] 
du manuscrit De l'essence double).
Dans la rubrique CORPUS ET TRUCS :
Christian MAUCERI
    Isotopie et indexation
Une approche interprétative de la classification automatique, appuyée 
aux acquis théoriques de la sémantique interprétative, ouvre des voies 
nouvelles à l'indexation en particulier et, en général, à 
l'herméneutique matérielle dont l'ambition est de réunifier 
l'herméneutique et la philologie. L'auteur propose notamment une 
pratique renouvelée de la classification automatique, ainsi que des 
améliorations de la technique d'indexation par sémantique latente.
Bill LOUW
    Contextual Prosody Theory :
    bringing Semantic Prosodies to Life
Introduit par Bill Louw en 1993 avant d'être repris et popularisé par 
John Sinclair, le concept de "prosodie sémantique" illustre l'intérêt 
des approches contextualistes pour la théorie sémantique. L'auteur en 
reprend ici les principales caractéristiques et propose des 
développements et une application à un texte littéraire.
Estelle DUBREIL
    Collocations : définitions et problématique
Etat de l'art sur les collocations : définitions et problématique 
selon la dichotomie lexicologie-lexicographie et linguistique de 
corpus.
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{BP, 09/07/2008}
ACTES
Les actes des JADT 2008 (9èmes journées internationales d'analyse 
statistique des données textuelles) sont disponibles aux Presses 
universitaires de Lyon et en ligne sur le site Lexicometrica :
    http://www.cavi.univ-paris3.fr/lexicometrica/
                jadt/jadt2008/tocJADT2008.htm
Ils s'ouvrent avec le texte de la conférence invitée de François 
Rastier : "Que cachent les "données textuelles" ?"
Informations complètes sur le site de la conférence
    http://jadt2008.ens-lsh.fr/
rubrique "Actes"
(lien direct : http://jadt2008.ens-lsh.fr/spip.php?rubrique109)
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Textes Textes Textes Textes Textes Textes Textes Textes Textes Textes
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{FR, 02/07/2008 et MV, 11/07/2008}
POUR UNE SCIENCE DES TEXTES INSTRUMENTÉE
    Textes, documents numériques, corpus.
    Pour une science des textes instrumentée
Etudes publiées sous la direction de Mathieu Valette
Syntaxe & Sémantique, 9 (à paraître)
            Présentation
Mathieu Valette
ATILF (CNRS, Nancy) & ERTIM (INaLCO, Paris)
La linguistique de corpus ne sera, selon toute vraisemblance, jamais 
établie en discipline académique. Aujourd'hui, nombre de linguistes, 
quels que soient leur discipline ou leurs objets d'étude, sont conduits 
à constituer des corpus numériques et à les étudier au moyen d'outils 
logiciels chaque année plus nombreux, sophistiqués et conviviaux. La 
banalisation de l'outil désenclave ainsi des pratiques longtemps 
réservées à une petite minorité que l'informatique ne rebutait pas. 
Mais cette évolution technologique, si elle peut avoir une incidence 
méthodologique (par exemple et minimalement, en substituant aux 
exemples construits des exemples attestés), n'a pas pour autant un 
impact fort sur les théories ni sur la définition des objets de la 
linguistique : à la morphologie, les corpus de mots ; à la syntaxe, les 
corpus de phrases ; aux théories énonciatives, les corpus d'énoncés. Et 
bien que tous ces objets d'étude proviennent de textes, ceux-ci ne sont 
que rarement considérés comme objet de science dans ces contextes 
disciplinaires. Ils sont réduits, par défaut, au statut préscientifique 
de ressource -un matériau brut dont la qualité est déterminée par la 
seule présence, après raffinage, de l'objet étudié. On collecte ainsi 
de l'indénombrable : "du" texte ou "du" corpus. 
    De la linguistique de corpus
    à une science des textes instrumentée
Or, le texte fait l'objet, avec cette fameuse société de l'information, 
d'un intérêt nouveau. Sa problématique s'articule en effet avec celle, 
récente, du document numérique, lequel est, pour beaucoup, le vecteur 
d'une révolution aussi importante que jadis le passage du volumen au 
codex. C'est peu dire que l'accroissement des données textuelles 
numérisées est actuellement soutenu, du fait d'Internet évidemment, 
mais aussi de la Gestion Electronique de Documents (GED). Ces nouveaux 
modes de production, de stockage et d'accès au document génèrent, outre 
des dépenses énergétiques considérables, de nouvelles questions et de 
nouvelles problématiques en termes d'analyse et d'indexation des 
contenus, de recherche d'information et d'interprétation assistée.
Les linguistiques du texte, jusque-là souvent cantonnées à l'analyse 
des textes littéraires ou politiques aux genres globalement bien 
décrits par la tradition, se trouvent confrontées à une grande variété 
de discours et de genres nouveaux, indéterminés, polymorphes et en 
permanente évolution [note 1] qu'il leur appartient de caractériser. Que ces 
discours et ces genres soient traces de nouvelles pratiques sociales ou 
modernisation de pratiques anciennes, il apparaît crucial pour la 
linguistique, science humaine et sociale, de prendre position face aux 
enjeux théoriques et méthodologiques naissants, et de ne pas laisser à 
d'autres disciplines (sciences de l'information et de la communication, 
ingénierie des connaissances, etc.) le soin de décrire, seules, ces 
nouveaux objets sémiotiques.
Parmi les linguistiques du texte, les propositions théoriques de 
F. Rastier (sémantique interprétative, sémantique textuelle) 
participent activement à ce débat (Rastier 1987, 2001). Ayant pour 
objet empirique le texte et non le mot, la phrase ou l'énoncé, 
traditionnellement privilégiés, cette linguistique-science des textes 
renoue avec une tradition rhétorique et herméneutique oubliée du 
XXème siècle et se concentre sur l'étude de la textualité, des genres 
textuels, des discours et de leurs corollaires (cohésion textuelle, 
intertextualité, etc.). Son appareil théorique est depuis le début des 
années 90 éprouvé par la linguistique de corpus [note 2], le 
TAL [note 3] et plus récemment par la Recherche d'Information [note 4].
L'association des outils logiciels aux outils théoriques et conceptuels 
peut avoir différentes conséquences :
(i) la validation logico-mathématique (établissement d'un "modèle" 
informatisé de la théorie) -valorisée dans certaines traditions 
linguistiques comme la syntaxe générative ou la linguistique cognitive, 
ce mode de validation, né avec l'informatique dans le sillon 
cybernétique, relève d'une esthétique scientifique souvent mal adaptée 
aux sciences humaines et sociales ;
(ii) la validation pratique (par des applications logicielles). Elle 
présente l'intérêt de confronter les scientifiques aux demandes 
sociales mais elle demeure assujettie aux passions technoscientistes 
contemporaines ; enfin
(iii) le déploiement de l'objet de recherche : l'instrumentation, 
constitutive de la linguistique de corpus, donne lieu à ce que nous 
pourrions appeler son "cercle vertueux". Les grandes masses de données 
textuelles ou documentaires nécessitent, pour être analysées et 
décrites, des dispositifs expérimentaux et des instruments ad hoc. 
Cette instrumentation permet de construire de nouveaux observables qui 
seraient demeurés invisibles autrement. 
    Propositions
C'est autour de ce concept d'observable et des vertus afférentes de 
l'instrumentation que s'articule cette livraison de la revue. Nous 
entendons faire le point sur certains des derniers développements de la 
linguistique des textes lorsque celle-ci a recours à des instruments de 
mesure. L'opus se focalise sur différents aspects porteurs pour la 
linguistique tant d'un point de vue théorique et épistémologique que 
dans la perspective de son applicabilité à des besoins sociaux, 
culturels et économiques aujourd'hui bien identifiés.
F. Rastier inaugure ce recueil par une réflexion sur l'articulation 
entre les concepts de texte, de document numérique, de donnée et de 
métadonnée. Initiant une discussion entre la linguistique des textes et 
l'ingénierie des connaissances, il oppose les connaissances du Web 
sémantique, fondées sur une approche ontologique a priori des concepts 
et ignorante des pratiques sociales qui ont permis la production des 
documents pourtant porteurs des concepts, et les connaissances 
sémiotiques (incluant le textuel) soumises aux évaluations et aux 
validations induites par la pratique. Loin des sentiers battus, il 
plaide contre le Web sémantique et pour une sémantique du Web 
restituant les contextes de production.
Les trois contributions suivantes exposent des réflexions nourries sur 
les relations entre interprétations et textualité. A cette fin, les 
auteurs convoquent et illustrent chacun à leur manière la notion 
d'isotopie.
I. Kanellos et Chr. Mauceri enquêtent sur les possibilités de 
réalisation d'une plateforme d'analyse interprétative des données 
conforme aux propositions de l'herméneutique traditionnelle. Leur 
projet est "de construire un outil en vue de donner corps, par son 
maniement, au cercle herméneutique de l'interprétation des données". 
Ils combinent à cette fin des outils interprétatifs tels que l'isotopie 
et des méthodes statistiques éprouvées comme l'analyse sémantique 
latente. L'un de leurs ambitieux objectifs est la réintroduction d'une 
autorité sémantique qui coopére avec le calcul et de lutter ainsi 
contre l'"attitude de prédation" des modèles et des techniques de 
calcul sur l'objectivité scientifique.
Les contributions de D. Mayaffre et S. Loiseau approfondissent le 
concept de contextualité. Le premier soutient notamment l'hypothèse que 
la cooccurrence en est la forme minimale. Tout en en détaillant 
opportunément l'histoire et les usages au sein de l'analyse des données 
textuelles, dans le domaine anglo-saxon et dans la tradition française, 
il discute de l'incidence du passage d'une statistique occurrentielle à 
une statistique cooccurrentielle. Selon lui, une cooccurrence, si elle 
est observée, est déjà sémantique : la cooccurrence peut en effet être 
perçue comme la première forme de contextualisation d'un mot par les 
autres. L'enjeu, pour D. Mayaffre, est de reconstituer la "trame 
lexicale" complexe ou les "entrelacements" lexicaux sous-jacents dans 
le corpus. Il ambitionne ainsi de contrôler la recherche des isotopies, 
des réseaux sémantiques ou des thèmes sans avoir recours à la seule 
intuition.
S. Loiseau développe des propositions voisines mais en déplace 
sensiblement les arguments. Selon lui, les interactions entre les 
différents types de normes et les interprétations liées à plusieurs 
niveaux d'analyse du texte constituent deux formes de contextualité à 
approfondir. S. Loiseau s'intéresse donc aux corpus multi-annotés qui 
articulent plusieurs niveaux de descriptions (morphologique, lexical, 
morphosyntaxique, syntaxique). Pour Loiseau, les observables issus 
d'annotations multiples permettent de décrire des normes linguistiques 
comme les discours et, de la sorte, d'accéder à la complexité empirique 
du palier de la textualité.
La contribution de B. Pincemin et ses collaborateurs est singulière : 
il s'agit de faire une synthèse des pratiques textométriques de 
quelques linguistes travaillant sur des corpus de textes médiévaux en 
analysant à la fois l'historique des requêtes soumises au logiciel 
d'interrogation et l'archive des questions des utilisateurs. Les 
auteurs en dégagent une interprétation linguistique des stratégies 
d'interrogation développées dans le cadre d'une instrumentation 
comportant des aspects classiques (moteur de recherche) et des aspects 
plus élaborés (calculs statistiques). Ce travail que l'on qualifierait 
ailleurs d'"analyse métier" a des incidences dans la formation, la 
documentation des outils et dans l'ergonomie logicielle. 
Il eût été regrettable de plaider pour une science des textes sans 
prendre en compte ce qui constitue historiquement un de ses 
fondements : la diversité des langues. Le projet de la linguistique 
oscille entre la description des variations inter-langues et 
l'observation d'universaux ou, plus récemment, d'invariants.
M. Slodzian observe que les nouvelles problématiques du document 
numérique et des réseaux électroniques sont confrontées à cette 
question. Le multilinguisme y est vu tantôt comme un obstacle, tantôt 
comme un atout. Selon elle, c'est la diversité linguistique et 
culturelle comme phénomène sémiotique fondamental qui est en jeu. 
Suivant l'orientation choisie, les programmes linguistiques sont en 
effet diamétralement opposés : ceux qui, au nom de l'efficacité, 
prônent la "débabélisation du monde" souhaitent le développement d'un 
instrument de communication, autrement dit un "interlinguisme" 
réducteur. Ceux qui voient dans la variété et la différence la 
condition même de la vie culturelle des sociétés auront pour objectif 
le "translinguisme". 
Par endroits, l'article de M. Slodzian fait écho à celui de F. Rastier 
car ils traitent tous deux, à leur manière, des pressions multiples 
exercées sur les langues par la fameuse mondialisation économique, 
politique et culturelle (pesée d'un très petit nombre de langues 
véhiculaires, normalisation et appauvrissement des échanges 
linguistiques, dévaluation des langues peu parlées, etc.) et de leurs 
conséquences pour une linguistique, science impliquée.
Enfin, J.-M. Daube apporte des éléments de réponse empiriques aux 
questionnements de M. Slodzian. Il expose une recherche en lexicologie 
textuelle visant la réalisation de lexiques bi- et trilingues. Il 
s'agit d'identifier et de recenser, dans une perspective 
lexicographique, des lexies à partir de corpus homogènes typés par 
domaines. Constatant les limitations des corpus parallèles alignés 
(corpus de textes traduits), J.-M. Daube discute de l'opposition corpus 
parallèle vs. corpus comparable. Il observe que la problématique de la 
constitution et de l'exploitation des corpus comparables n'est, à 
l'heure actuelle, qu'esquissée.
Ces sept contributions tracent à grands traits un parcours au sein de 
ce qui constitue une science des textes moderne où les formes 
documentaires sont considérées non pas seulement comme un  nouveau 
matériau succédant au précédent mais comme les vecteurs de nouvelles 
pratiques. Loin d'une technophilie ravie, l'établissement d'une 
linguistique-science des textes instrumentée pose de façon critique -et 
pratique- sa relation à l'outil, son rapport à la Technique, et aux 
dangers d'une substitution non réflexive voire, osons l'épithète, 
totalitaire.
    Notes
[1] Par exemple, dans le domaine de l'auto-édition, les "pages perso", 
florissantes il y a quelques années, tendent aujourd'hui à se 
marginaliser tandis que les blogs, réputés interactifs, se développent 
fortement. Ils associent généralement les billets (ou notes, ou 
"posts") d'un internaute ou d'une communauté d'internautes-auteurs et 
quelques commentaires d'internautes-lecteurs).
[2] Lire (Bourion 2001), (Loiseau 2006), (Poudat 2006).
[3] Lire (Beust 1998), (Thlivitis 1998) (Bommier-Pincemin 1999), 
(Perlerin 2004), (Rossignol 2005).
[4] Lire (Valette 2004), (Mauceri 2007), (Valette & Slodzian 2008).
    Références
Beust, P. (1998) Contribution a un modèle interactionniste du sens. 
Amorce d'une compétence interprétative pour les machines, Thèse de 
doctorat, Caen.
Bommier-Pincemin, B. (1999) Diffusion ciblée automatique 
d'informations : conception et mise en oeuvre d'une linguistique 
textuelle pour la caractérisation des destinataires et des documents, 
Thèse de Doctorat, Paris IV Sorbonne. 
Bourion, E. (2001) L'aide à l'interprétation des textes électroniques, 
Thèse de doctorat, Nancy 2.
Loiseau, S. (2006) Sémantique du discours philosophique : du corpus aux 
normes. Autour de G. Deleuze et des années 60, Thèse de doctorat, 
Paris X-Nanterre.
Mauceri, Chr. (2007) Indexation et isotopie : vers une analyse 
interprétative des données textuelles, Thèse de doctorat, ENSTB.
Perlerin, V. (2004) Sémantique légère pour le document. Assistance 
personnalisée pour l'accès au document et l'exploration de son contenu, 
Thèse de doctorat, Caen.
Poudat, C. (2006) Etude contrastive de l'article scientifique de revue 
linguistique dans une perspective d'analyse des genres, Thèse de 
doctorat, Orléans.
Rastier, F. (1987) Sémantique interprétative, Paris, PUF.
Rastier, F. (2001) Arts et sciences du texte, Paris, PUF.
Rossignol, M. (2005) Acquisition sur corpus d'informations lexicales 
fondées sur la sémantique différentielle. Thèse de doctorat, Rennes 1, 
disponible sur http://www.texto-revue.net.
Thlivitis, T. (1998) Sémantique Interprétative Intertextuelle : 
assistance informatique anthropocentrée à la compréhension des textes, 
Thèse de doctorat, Rennes 1.
Valette, M. (2004) "Sémantique interprétative appliquée à la détection 
automatique de documents racistes et xénophobes sur Internet", 
Approches Sémantiques du Document Numérique, Actes du 7e Colloque 
International sur le Document Electronique, P. Enjalbert et M. Gaio, 
eds, 215-230. 
Valette, M., Slodzian, M. (2008) "Sémantique des textes et Recherche 
d'information", Extraction d'information : l'apport de la linguistique, 
A. Condamines & Th. Poibeau, éds., Revue Française de Linguistique 
Appliquée (volume XIII-1 / juin 2008), 119-133.
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{FR, 02/07/2008}
LETTRE SUR SAUSSURE
François Rastier
Lettre sur Saussure -en réponse à des questions d'un collègue de 
l'Académie des Sciences, 
avril 2008 (extraits)
1. Purement oppositive comme vous le savez, la valeur est établie 
indépendamment de la substance, et l'on peut parfaitement considérer la 
glossématique comme une réalisation possible et inachevée du programme 
de recherche sur les valeurs pures. Un auteur comme Coursil le reprend 
sur d'autres bases (mathématiques). Je plaiderai pour ma part la cause 
des "valeurs impures".
L'opposition sémiotique/sémantique telle qu'elle apparaît chez un 
Benveniste tardif me paraît peu fondée (sauf à ériger la 
catégorématicité en critère fondateur) et ne fait que renforcer 
l'incapacité d'une linguistique phrastique à prendre en considération 
la dimension du texte.
Comme dans la plupart des manuscrits, les textes retrouvés de Saussure 
témoignent d'une pensée qui se cherche (mais se trouve aussi). Cela 
tranche avec le genre du traité adopté par les rédacteurs du CLG (qui 
ont gommé toute problématisation), voire le genre des notes de cours 
adopté tout naturellement par Constantin. Qui d'entre nous accepterait 
d'être jugé sur des notes d'étudiants compilées par des collègues ?
Les "malentendus persistants" dont vous doutez tiennent à l'histoire du 
saussurisme ; je rappellerai trois points : 
(i) Les éditeurs du CLG ont délibérément manipulé leurs sources pour 
faire de Saussure un linguiste de la langue (voir la dernière phrase, 
de Bopp, attribuée à Saussure ; Bally développant ensuite pour son 
compte une linguistique de la parole). Vous définissez la langue 
saussurienne, pour l'essentiel, à partir du CLG, dont les positions 
sont unilatérales en la matière. Toutefois, la langue pour Saussure 
n'est qu'un terme de la dualité langue/parole, et comme les éditeurs du 
CLG ont gommé la linguistique de la parole, la conception de la langue 
qu'il véhicule reste unilatérale et tant soit peu dogmatique.
(ii) Les manuscrits, à partir des années 50, ont été lus par rapport au 
CLG, et non par rapport aux textes authentiques de Saussure. 
(iii) Le structuralisme français, par la médiation de Lévi-Strauss, 
doit beaucoup plus à Jakobson qu'à Saussure : le binarisme jakobsonien 
n'a rien de commun, par exemple, avec les dualités saussuriennes.
À la parution des Écrits de linguistique générale, d'excellents 
collègues ont conclu qu'il n'y avait rien de nouveau sous le soleil. La 
plupart soutenaient depuis des décennies qu'il fallait dépasser 
Saussure pour édifier une linguistique de la parole. Or c'est notamment 
l'articulation entre linguistique de la langue et linguistique de la 
parole qui fait l'originalité de l'étude intitulée De l'essence double 
du langage. La même étude et d'autres dans le recueil engagent à 
reconsidérer la vulgate concernant la sémiose (notamment le modèle du 
signe), les dualités (qui ne sont pas des dichotomies), et surtout la 
méthodologie (dite aphoristique) qui n'apparaît pas dans le CLG. 
Malgré le paradoxe d'une réception retardée, et pour des raisons 
simplement philologiques qui vont sans dire, il me semble qu'il reste 
indispensable de relire dans son ensemble le corpus saussurien 
autographe, manuscrit ou publié. Ce travail a progressé depuis dix ans, 
mais beaucoup reste à faire (des milliers de feuillets sont encore 
inédits).
2. Si Saussure a puisé dans ses manuscrits, pour une part, la teneur de 
ses cours, le fait que sa linguistique générale ait été connue par ses 
Cours n'entraîne pas que ces manuscrits soient des notes préparatoires 
aux cours. De l'essence double est le manuscrit d'un traité de 
linguistique générale, et non d'un cours professé vingt ans plus tard. 
Un cours ne livre jamais toute la pensée de son auteur, mais seulement 
ce qu'il estime nécessaire à la formation de ses étudiants et ce qu'il 
croit à leur portée.
En outre, si pour certains universitaires tout doit aboutir à des 
cours, l'ambition de Saussure va au-delà, puisqu'il entend refonder la 
discipline qu'il aura à enseigner. Aussi considérer les manuscrits à la 
lumière du Cours, comme y engage d'ailleurs l'édition monumentale 
d'Engler, conduit à sous-estimer la variété de leurs statuts, de leurs 
genres, de leurs projets, qui le plus souvent s'écartent des cours. En 
rapportant à chaque phrase du Cours les "sources manuscrites" quand 
elles existent (car les éditeurs n'ont pas hésité à insérer des 
paragraphes de leur cru), on démembre les textes originaux, on en fait 
une rhapsodie de passages préparatoires, sans tenir compte de leur 
textualité propre, et en tout premier lieu de leur cohérence. On a beau 
jeu alors de dire qu'ils n'apportent rien de nouveau.
Outre les tâches philologiques d'édition de Saussure, il importe, en 
tenant compte des progrès de la linguistique de corpus, de restituer la 
variété générique du corpus saussurien et son évolution diachronique. 
Cela intéresse en premier lieu les manuscrits. Le nom générique et 
souvent péjoratif de brouillons reste trompeur : si certains sont 
effectivement des brouillons de textes publiés, l'immense majorité sont 
des oeuvres inédites. Cela va de la note de cours et de la réflexion 
aide-mémoire au brouillon de conférence et au traité rédigé.
L'étude unifiée du corpus des textes authentiques (tant publiés 
qu'inédits) permettra de restituer la dynamique d'une recherche, 
étendue sur plusieurs décennies et recourant à différents genres. C'est 
une condition pour relire les textes que l'on a mis indûment sur le 
même plan, des cahiers d'étudiants au CLG.
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{FR, 02/07/2008}
COLLOQUE
Colloque international
            Le Monde du Symbolique
        - en hommage à Claude Lévi-Strauss
Organisé par l'Institut Ferdinand de Saussure
et le Centre de coopération franco-norvégienne en sciences humaines et 
sociales
Paris, 21-22 novembre 2008, Maison des Sciences de l'Homme
54, bd. Raspail 75006 Paris
Appel à communications . - Si l'on a jadis exalté un problématique 
structuralisme (regroupant Barthes, Lacan, Althusser, Foucault et tant 
d'autres) pour le condamner au début des années 1970,  Saussure et 
Lévi-Strauss étant les premières cibles de cette damnatio, le programme
d'une  étude scientifique interdisciplinaire du monde symbolique n'a 
cessé d'inspirer des recherches novatrices en linguistique, en 
anthropologie et dans les autres sciences de la culture. Ce colloque 
entend ouvrir des champs de réflexion et de débat sur ces trois thèmes :
(i) la légitimité d'une relecture présentiste du programme des "études 
des signes et de leur vie dans les sociétés humaines" (Saussure) ; 
(ii) l'actualité d'une philosophie des formes symboliques ; 
(iii) la critique, d'un point de vue sémiotique, des paradigmes de la 
communication et de la cognition, comme le développement corrélatif 
d'un programme épistémologique de culturalisation. 
Calendrier. - Les propositions de communication (un résumé d'une page) 
sont à envoyer avant le 20 septembre à l'adresse LPE2@ext.jussieu.fr ; 
le programme définitif sera publié le 20 octobre.
Comité d'initiative : Simon Bouquet (Paris X), François Rastier 
(CNRS-Inalco), Arild Utaker (Bergen).
Claude Lévi-Strauss, dont ce colloque célèbre le centième anniversaire, 
est Président d'honneur de l'Institut Ferdinand de Saussure.
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{Rinck, 03/07/2008}
APPEL A CONTRIBUTIONS
Numéro 41 de LIDIL (sortie prévue juin 2010) :
    Énonciation et rhétorique dans l'écrit scientifique
Numéro coordonné par Françoise Boch et Fanny Rinck
Ce numéro vise à réunir des contributions sur l'écrit scientifique dans 
une perspective linguistique et didactique.
Deux types de contribution sont attendus :
- d'une part la description des pratiques de l'écrit scientifique chez 
les experts et leur comparaison avec les pratiques des nouveaux 
entrants dans le champ que sont les doctorants.
- d'autre part la transposition didactique des caractéristiques 
énonciatives et rhétoriques de l'écrit de recherche : manuels, 
propositions innovantes, etc.
Trois axes d'analyse seront privilégiés : la présence de l'auteur dans 
son texte ; l'interdiscours ; l'interlocution.
=> Version complète de l'appel :
    http://w3.u-grenoble3.fr/lidilem/labo (rubrique événements)
Vos propositions sont attendues pour le 1er octobre 2008 sous la forme 
d'un résumé d'une page environ, soit entre 4000 et 5000 signes. Les 
articles rédigés sont à remettre en juin 2009.
Langues des propositions et articles : français ou anglais.
A envoyer à francoise.boch@u-grenoble3.fr et fanny.rinck@u-grenoble3.fr 
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