LE TERME : ENTRE ONTOLOGIE ET LINGUISTIQUE

François RASTIER
C.N.R.S.

(Texte publié dans La banque des mots, 1995, n°7, p. 35-65)

Dans cette étude, nous rapporterons les difficultés et les succès pratiques que connaît la terminologie à ce que l'on peut appeler la doctrine terminologique. Créée dans les années trente par des chercheurs comme Wüster (au sein du cercle de Vienne) et Drezen (pour l'école soviétique), cette doctrine s'exprime aujourd'hui sous diverses formes canoniques, comme le manuel de Felber (patronné par l'Unesco-Infoterm et l'Unisist) ou la norme ISO. Nous la rapprocherons de la problématique de la signification dominante en Intelligence Artificielle.

La terminologie établit et renforce ses liens avec l'IA : outre des applications, comme l'aide assistée à la documentation ou à la traduction, elle y trouve un renfort pour ses hypothèses fondatrices.

On sait que la problématique dominante de l'IA est organisée autour de la notion de représentation, et qu'elle se fixe notamment pour objectif la représentation des connaissances. Cette position concorde avec la définition canonique que Felber donne de la terminologie : « Domaine du savoir interdisciplinaire et transdisciplinaire ayant trait aux notions et à leurs représentations (termes, symboles, etc.) » (1987, p. 1). Retenons que les notions, entités conceptuelles, priment en terminologie sur leurs expressions, linguistiques ou non, considérées en fait comme des variables, certes importantes, mais inessentielles.

La terminologie a-t-elle pour objet des systèmes conceptuels ou des structures lexicales ? Dans la seconde hypothèse, elle serait simplement une branche descriptive ou normative de la linguistique appliquée, relevant de la lexicologie, et traitant séparément de domaines sémantiques correspondant à diverses disciplines (à la différence de la lexicographie, qui les mêle tous). Avant d'explorer successivement ces hypothèses, nous rappelons trois conceptions du lexique.

(i) Le lexique comme nomenclature , dont on trouve trace dès le troisième millénaire dans les premiers documents linguistiques babyloniens : des listes de mots. Le langage adamique, selon la Bible, est d'ailleurs fait de noms.

La lexicographie a gardé quelque chose de cette antique tradition, mais atténué sa rudesse en multipliant les indicateurs et les renvois.

(ii) Le lexique comme taxinomie , que la tradition aristotélicienne a permis d'élaborer peu à peu, jusqu'à nos jours. Les projets d'encyclopédie structurée par réseaux sémantiques, comme ceux de Lenat, en sont un aboutissement. Le modèle aristotélicien puis linnéen de la taxinomie zoologique demeure l'exemple privilégié (ainsi Berlin et Kay ont ils redécouvert récemment le genre sous le nom de niveau superordonné , et l'espèce ou niveau de base ). Parmi les tenants de cette conception, les débats portent pour l'essentiel sur deux problèmes.

a) Le lexique est-il organisé par des arbres ou par des treillis ? A la tradition des arbres de Porphyre, illustrée à la Renaissance par Pacius et de nos jours par les théoriciens de l'IA classique (l'auteur, 1987), on peut opposer les théories des rattachements multiples, comme celles d'Abélard ou de Pacius, réinventées aujourd'hui par certains connexionnistes.

b) Un terme peut-il connaître des degrés d'appartenance ? Cette question a été récemment illustrée par les théories de la typicalité, qui se situent quoiqu'on en dise dans la tradition taxinomique. En terminologie, on choisit de préférence le modèle taxinomique et l'appartenance absolue.

(iii) Une troisième conception du lexique, qui ne relève pas de la lexicographie, mais de la lexicologie, estime que tout lexique est une reconstruction, qui fait abstraction du contexte et du texte. Cette abstraction a son utilité, en didactique par exemple. Elle ne peut être maintenue hors de ses applications pratiques ni érigée en principe descriptif. L'objectif reste précisément de décrire les interrelations du palier lexical avec les autres paliers, syntagme, période et texte.

Par ailleurs, seul le lexique des morphèmes appartient à la langue. En outre, le lexique des lexies n'est pas organisé en une structure unique. Tout comme les grammèmes, les lexèmes ne connaissent que des structures locales, qui obéissent à des principes de structuration communs, mais ne se laissent pas regrouper en un ensemble unique. Les seuls regroupements de quelque ampleur sont précisément le fait de normes disciplinaires, comme la taxinomie zoologique. Et, comme on sait, l'entreprise normative a tôt fait de transformer des usages en normes, et des normes en règles.

Les deux premières conceptions du lexique sont évidemment normatives, et s'accordent avec les objectifs politiques de normalisation et d'uniformisation. Les premières nomenclatures ont été produites par les premiers états centralisés. Les dictionnaires ont aussi des enjeux politiques, et il va sans dire qu'en France le Dictionnaire de l'Académie, comme les Dictionnaires des Arts et Métiers, entrepris la même année (1664) expriment la volonté législatrice de la puissance royale. De nos jours, le Trésor de la Langue Française doit sa naissance à la volonté gaullienne, et il n'est pas indifférent que les grands commanditaires de terminologies techniques soient des entreprises nationalisées ou contrôlées par l'état (Matra, EDF, SNCF).

I.Terminologie et ontologie

Le concept même de terme n'impose pas par lui-même de choisir entre signifié et concept, ce qui le rend commode si l'on veut éviter de trancher entre le sémantique et le mental. Historiquement, il appartient à la logique. Il est de tradition dans la syllogistique : dans Socrate est un homme , Socrate et homme sont des termes. Aujourd'hui les recherches en IA sur l'héritage des propriétés poursuivent l'entreprise de la syllogistique dans le cadre d'une logique des classes.

A. Référence et signification

Au XIIIe siècle, le terme donne son nom à la logique terministe, qui est pour l'essentiel une théorie de la supposition (nous dirions aujourd'hui dénotation ). Elle se fondit en Angleterre avec le courant nominaliste, ancêtre de la philosophie analytique et du positivisme logique dont procède le projet fondateur de Wüster.

La logique terministe est pour l'essentiel une théorie de la référence des noms. Dans sa version parisienne, elle est non-contextualiste, les maîtres admettant que le terme per se sumptus est pourvu d'une signification naturelle, précisément une extension prépropositionnelle que son insertion dans une proposition peut certes modifier, mais sans contribuer pour autant à la définir.

Au demeurant, ce non-contextualisme semble traditionnel en sémantique française, comme il apparaît dans la Logique de Port-Royal, la théorie de la signification chez Beauzée, et de nos jours dans les travaux de Kleiber et de Martin sur la référence des noms. Il a encore une incidence sur les débats contemporains. La fixité de la référence et le caractère non-contextuel de la signification vont évidemment de pair.

Les définitions du terme se font au sein du triangle sémiotique, de tradition aristotélicienne, dont les sommets sont le mot, le concept et la chose. Le triangle terminologique de Wüster en est une simple reformulation (cf. Lerat, 1994, p. 37-38). Cependant, l'aristotélisme du triangle sémiotique est durci par le positivisme logique qui exprime un idéal de correspondance si l'on peut dire terme à terme entre un mot, un concept et un objet. On retrouve là le problème de la correspondance des modi : significandi , intelligendi et essendi .

Le rapport du mot au concept au sein du triangle sémiotique repose les questions de la polysémie, d'une part, et médiatement de la référence. Elles ne peuvent l'être qu'au sein d'une ontologie réaliste, dont témoigne l'histoire même du concept de terme.

Le rapport du concept au référent n'est pas moins problématique pour la linguistique, car il lui échappe totalement : ces deux relata sont extralinguistiques. Il est bien entendu dans la tradition aristotélicienne que les concepts pas plus que les choses ne varient avec les langues, et ce n'est pas sans effet sur la terminologie : les notions (ou concepts) qu'expriment les termes « ne sont pas liées aux langues individuelles » (ISO 3.1).

Pas plus que le concept, jugé universel, le référent ne varie. Non seulement parce que les choses sont « les mêmes pour tout le monde » comme le dit Aristote, mais, plus profondément, et dès lors que l'on place l'être dans les choses, parce que l'être lui-même se définit comme permanence. Nous devons cela à la fondation parménidienne de l'ontologie, qui eut pour première conséquence le programme d'univocité de l'école éléatique.

On sait que Wüster mentionne l'ontologie parmi les disciplines connexes à la terminologie. Or, dans le dispositif du triangle sémiotique classique, c'est l'identité à soi de la chose qui garantit celle du concept qui la représente, et, par cette médiation, l'univocité du mot.

Dans sa Métaphysique , Aristote fonde ainsi l'unité objective de la signification des mots sur l'essence (ousia ) ou quiddité (to ti esti ) de ce qu'ils désignent : « Par signification unique, j'entends ceci : si homme signifie telle chose et si quelque être est homme, telle chose sera l'essence de l'homme » (G, 4, 1006 a 32). Ainsi, conclut justement Aubenque : « la permanence de l'essence est ainsi présupposée comme le fondement de l'unité du sens : c'est parce que les choses ont une essence que les mots ont un sens » (1962, p. 128). Cette conception substantialiste fonde on le sait la tradition dominante en matière de théorie de la signification, que ce soit en grammaire, en logique, ou en philosophie du langage.

Peu importe ici que la détermination de la chose sur le mot puisse fort bien être renversée, et que l'usage réitéré du mot dans une même pratique puisse susciter une impression référentielle assez stable et partagée pour créer l'illusion d'une stabilité des choses qu'il sert à catégoriser. Ce qui nous paraît notable, c'est l'absence du signifié linguistique : dans cette conception référentielle, il s'identifie proprement au concept. Et selon Wüster, les concepts ou notions correspondent au système de la langue (cf. Felber, 1987, pp. 84-85). Deux questions se posent ici : comment les concepts relèveraient-ils du système de la langue, puisqu'ils ne diffèrent pas selon les langues ? Et comment soutenir par ailleurs que les signifiés relèvent du système de la langue ? Il faudrait pour cela que le lexique en relève, ce qui est douteux, et omettre que le sens résulte de l'interprétation des textes oraux et écrits par des sujets situés. Mais le problème de l'interprétation est rabattu ici sur la référence : si la référence du signe est fixe, son interprétation, au sens logique, ne présente aucune difficulté et semble aller d'elle-même.

Bref, la terminologie est ici tributaire des limites de la philosophie du langage : cette tradition d'origine scolastique a longtemps préexisté à la linguistique, et traite toujours de la pensée plutôt que du langage -- ou du langage en termes de pensée ; du langage plutôt que des langues ; des signes plutôt que des textes. Elle trouve dans la terminologie une alliée de choix : les normes internationales qui président à la stabilisation des terminologies permettent précisément des équivalences de langue à langue admises par les collectivités scientifiques et techniques.

Mais cela ne permet point de conclure à la stabilité des choses et des concepts. Du moins, cette stabilité temporaire doit tout à des normes historiques, et rien aux lois de la nature, de la pensée ou du langage.

Caractéristique de l'incidence de la philosophie du langage sur la terminologie, la restriction de fait du terme au mot, et du mot au nom. On sait l'obsession nominale de cette philosophie : elle témoigne de ses objectifs ontologiques, car le nom est censé refléter l'entité, et l'on doit à cette croyance invétérée à la philosophie présocratique.

Aujourd'hui encore, dans la définition du nom, la valeur ontologique demeure souvent prééminente sur les critères morphologiques. Par exemple, Langacker (1991) définit les noms par rapport aux objets (avec redéfinition spatiale de l'objectivité). Cf. aussi Charaudeau, 1992, p. 21 : « Les êtres sont exprimés par une catégorie traditionnellement appelée nom ou substantif ». Ces postulats ne s'appuient sur aucune base empirique, et d'ailleurs n'en ont pas besoin, car ils sont de l'ordre de la croyance.

Le nom doit sans doute sa précellence à deux raisons. D'une part, il suppose une permanence dans le temps, car dans la tradition indo-européenne que poursuit la philosophie présocratique, le nom est d'abord le nom propre (thèse qui réapparaît régulièrement dans les théories sur l'origine du langage), c'est à dire le nom donné par le père, et qui peut ainsi survivre à la mort.

Par ailleurs, si l'opposition verbo-nominale n'a rien d'universel, dans les langues indo-européennes les "noms" sont des parties du discours sans affixes aspectuels et temporels. Ils échappent ainsi à l'impermanence tant vilipendée par notre tradition ontologique, Parménide et Platon en tête.

Encore faut-il s'assurer que le nom désigne une et une seule chose. Philosophes et grammairiens font depuis le Cratyle le rêve de l'orthonymie, désignation correcte et directe. Les Stoïciens estimaient que le nom tombe droit de la pensée vers ce qu'il désigne, et comparaient cette chute à celle d'un stylet qui se fiche droit (orthon ) dans le sol (cf. Lallot, 1989, p. 141). Dernier en date, Pottier définit ainsi l'orthonyme : "mot juste"(1992, p. 42), "désignation privilégiée, immédiate" (1992, p. 123).

Ensuite, il faut s'assurer de l'univocité des noms, de manière à ce qu'ils désignent une chose, mais une seule. Aussi, un grand rêve d'univocité traverse notre tradition, que résume pour les Modernes le grand principe de Sanctius : « Unius vocis unica est significatio » (un mot, une et une seule signification).

f) La précellence des noms ne fait aucun doute en terminologie. La norme ISO aujourd'hui en vigueur, qui doit beaucoup à Felber, et par son maître Wüster au positivisme logique, définit ainsi le nom : « Nom : désignation d'un objet par une unité linguistique » (§ 5313). Comme les noms propres selon Stuart Mill (ASystem of Logic ), les termes sont jugés dépourvus de connotation, et donc censés réaliser la dénotation parfaite.

On comprend dès lors la définition du terme comme nom : (« nom définissable à l'intérieur d'un système cohérent », Rey-Debove, 1979) et des constatations comme celle-ci : « la base des terminologies est constituée d'unités nominales » (Otman, 1995, p. 43). De fait, les systèmes d'extraction automatique de termes, comme le TERMINO de David et Plante (ATO, 1990-1993) ou le LEXTER de Bourigault (EDF-DER, 1993) ne traitent que les syntagmes nominaux.

On peut trouver douteux que « le nom soit, avec le verbe, la catégorie grammaticale la plus riche du point de vue de l'information sémantique véhiculée » (ibid.) ; mais cette justification discutable se comprend si l'on convient, à la suite de Priscien et de la tradition qu'il résume, que la référence d'une proposition est assurée par ses termes catégorématiques.

Cette croyance ne repose malheureusement que sur ses préjugés ontologiques, et elle est révoquée sans peine par une analyse en morphèmes : comment établir par exemple, que contestable ou incontestablement sont moins riches en information sémantique que contestation ou contester ?

Le postulat nominal reste influent, et les terminologies sont de fait massivement constituées de noms. Mais ne gagneraient-elles pas à laisser place, de manière réfléchie et systématique, aux autres parties du discours -- sans parler de s'étendre au delà du nom et du syntagme nominal ?

Naturellement, ces suggestions concernent au premier chef la linguistique. La doctrine terminologique ne fait que radicaliser des préjugés logico-grammaticaux millénaires. Par exemple, les principes conjoints d'orthonymie et d'univocité montrent que l'idéal terminologique porte l'idéologie nominale à son stade suprême -- et ultime espérons-le.

B. Systèmes terminologiques, ontologies du domaine et représentation des connaissances

Bien entendu, la terminologie contemporaine ne se limite point à une réflexion sur le signe, et conçoit la langue tout autrement qu'une nomenclature : la notion de système terminologique veut que les termes soient reliés entre eux par des relations "conceptuelles" hors discours. Pour certains auteurs, elle participe de ce qu'on appelle en IA la représentation des connaissances, et décrit des systèmes notionnels correspondant à l'ontologie des domaines de spécialité (cf. Otman, 1995).

Or, en IA précisément, le programme de "représentation des connaissances" doit beaucoup à la tradition aristotélicienne, telle qu'elle a été réélaborée par le positivisme logique, et notamment le premier Wittgenstein : ainsi Regoszei et Hirst, spécialistes reconnus, estiment-ils que le triangle sémiotique est le moyen d'apparier les états de choses, les réseaux conceptuels et les champs lexicaux (1990). Ces trois niveaux de la "représentation des connaissances" permettraient à l'IA, avec une modélisation par réseaux, de mettre en correspondance les lois de la nature, de la pensée et du langage.

Cependant, les réseaux sémantiques sont hétérogènes : les relations qui les structurent sont de deux ordres. Celle des réseaux arborescents sont des relations "verticales" d'héritage, fondées sur l'équivalence partielle des noeuds, alors que celles des graphes conceptuels sont des relations fondées sur la différence des noeuds, comme les relations casuelles. Le modèle de Sowa doit une partie de son succès à sa capacité d'intégrer ces deux sortes de relations.

Si les relations verticales d'héritage, du type est-un et partie-de , sont les mieux étudiées, car elles répondent à l'interrogation métaphysique sur les genres suprêmes, les relations horizontales sont de type linguistique : dans le système d'Otman (1995), c'est la parasynonymie pour équivalent à , l'opposition et l'appartenance au même taxème pour contraste avec , l'afférence pour proximité de ; enfin, fonction-de pallie l'absence de fait des verbes et correspond aux sèmes fonctionnels (tels que /pour s'asseoir/ dans `siège'). En fait, l'IA, comme la terminologie n'a pas choisi entre deux objectifs : représenter la hiérarchie des substances au sein d'une ontologie, ou l'interaction des signifiés dans les textes. La disparate, au sein des réseaux, entre relations verticales et horizontales témoigne de cette contradiction.

On peut certes formuler la thèse qu'un champ de connaissance se laisse représenter sans reste par un ensemble de termes (Otman, 1995, p. 19). Elle redouble le postulat nominaliste qu'un domaine empirique est un ensemble d'entités individuelles. Mais si c'était le cas, à quoi serviraient les textes "de spécialité" ? On pourrait les négliger, et en rester au faux débat sur le format de cette représentation, dictionnaire ou encyclopédie. En fait, si l'on prend les termes pour point de référence, on doit convenir que les textes instaurent entre eux, modifient et problématisent des relations bien plus riches que n'en retiennent les divers formats de représentation des connaissances. Les textes ne sont pas faits de mots, pas plus qu'un domaine ne se réduit à une collection d'individus.

Dans cette problématique, la notion de connaissance reste le principe organisateur du lexique, comme s'il se bornait à refléter un savoir partagé sur le monde. Mais elle ne rend pas compte des processus sémantiques qui permettent la création de nouvelles acceptions et de nouveaux emplois, non-dérivables de connaissances même encyclopédiques. En cela, les réseaux, notamment les arborescents, se heurtent au même type d'objection que la syllogistique classique, dont ils ont hérité : leur parcours n'apprend rien que l'on ne sache déjà.

C. Les quatre voies du perfectionnement

Dans sa remarquable synthèse, Otman regrette l'imperfection des langues (cf. 1995, p. 113), et ce regret rappelle l'objectif normatif de la terminologie, clairement formulé par Wüster.

Au delà, il convient de souligner que le thème de l'imperfection des langues est un thème moderne, lié à l'essor des sciences et à la laïcisation progressive de la notion de connaissance. Tant qu'elles pouvaient être le véhicule d'une Révélation, les langues, du moins les langues sapientielles restaient au-dessus de tout soupçon. Mais dès lors qu'il s'agit de refléter non point (ou point seulement) les volontés de Dieu mais les exigences de la Raison, le langage, dont seul l'abus sophistique était vilipendé, devient lui-même suspect, en quelque sorte sophiste en puissance, sinon par nature. On déplore avec une vigueur nouvelle la variation de l'usage, la polysémie, l'ambiguité, etc., et ces prétendues imperfections, élevées au rang de "phénomènes" donnent encore lieu à de nombreux programmes de recherche.

Comment nos langues pourraient-elles dire le vrai ? Comment en faire l'instrument fidèle d'une pensée correcte ? Le postulat de Condillac que la science est une langue bien faite éclaire le vaste mouvement de perfectionnement qui se développe depuis trois siècles. Il s'ouvre dans l'histoire moderne quatre voies principales.

(i) La première est celle des langues artificielles : on en a depuis le XVIème siècle créé des centaines, dont l'espéranto reste la plus connue. Cette voie a retenu d'excellents auteurs, comme Peano, avec son latino sine flexione , jusqu'au début de ce siècle.

(ii) La seconde est celle des idéographies : les entreprises de Dalgarno et Wilkins ont inspiré la characteristica de Leibniz, et la Begriffsschrift de Frege se situe encore explicitement dans sa lignée. Les interlangues utilisées en traduction automatique sont des idéographies techniques qui mettent en oeuvre le même projet philosophique.

(iii) La troisième est celle des langages formels, promue aussi bien par les rationalistes (Leibniz) que par les empiristes (Condillac, La langue des calculs ).

La logistique de Russell et Whitehead, inspirée explicitement des idéographies de Frege et Peano, en fixé les bases. La théorie contemporaine des langages formels se divise en théorie des grammaires et théorie des automates, base théorique de l'informatique, et de certaines grammaires universelles (Chomsky, Shaumjan). On lui doit les bases théoriques de l'IA.

(iv) La dernière voie, somme toute réformiste, est celle des langues exactes dans leur terminologie et rigoureuses dans leur discursivité. Elle se subdivise en deux chemins : la fixation de normes lexicales (de l'Académie française à la norme ISO) et grammaticales, et la fixation de normes du raisonnement et de l'argumentation philosophique (ce chemin conduit de Descartes à la philosophie analytique, Russell et Wittgenstein notamment).

L'unité de ces voies mérite d'être soulignée si l'on veut saisir l'ambition du projet terminologique dans toute son ampleur. Comme le soulignait W. Benjamin, « les efforts des techniciens pour normaliser leur vocabulaire correspondent à la plus sérieuse tentative de constituer un langage international, idée dont l'arbre généalogique remonte à plusieurs siècles » (p. 20). Wüster d'ailleurs rappelle d'ailleurs que la terminologie « conduit à une langue de la terminologie internationale », et appelle les terminologies des « langues artificielles » (1981, p. 83).

L'insistance sur le caractère international des terminologies va évidemment de soi si l'on songe à la diffusion internationale des disciplines techniques et scientifiques. Mais pourquoi parler d'une langue de la terminologie internationale, alors que l'on peut tout au plus coordonner les normes terminologiques dans chaque langue ? Cela laisse à penser que comme les idéographies et les langues artificielles, la terminologie a aussi pour vocation de rédimer Babel. Du moins, l'on pourrait relire en ce sens ce passage du De Vulgari Eloquentia (I, 7) où Dante établit que seules les langues spécialisées ont permis à l'humanité de survivre à la confusion de Babel : « Il ne resta une même langue (loquela ) qu'à ceux qui s'étaient groupés pour une seule et même tâche : ainsi par exemple, il resta une langue pour tous les architectes, une autre pour tous les leveurs de pierre, une autre encore pour tous ceux qui les taillaient et ainsi de suite pour chacun des ouvriers ».

Quoi qu'il en soit, les quatre voies du perfectionnement convergent fréquemment. Peano explora la première et la troisième, comme Couturat, l'éditeur de Leibniz ; Drezen, le fondateur de l'école terminologique russe, la première et la dernière (si bien qu'il fut peut-être exécuté pour son espérantisme militant).

Leibniz explora simultanément la seconde et la troisième. Aujourd'hui, le langage mental à la Fodor, idéographie formelle supposée propre à l'esprit lui-même, naturalise pour ainsi dire leur unité -- sans d'ailleurs aucune base empirique, ce qui suggère que ce mentalais concrétise le rationalisme dogmatique du cognitivisme.

L'unité des deux dernières voies se trouve dans la notion de métalangage. La vérité scientifique s'énonce alors soit par un usage métalinguistique de la langue, soit dans un métalangage créé à cet effet. Il va sans dire que le courant formaliste de l'épistémologie animé par le positivisme logique a préféré le métalangage formel : ainsi par exemple la sémantique linguistique est régulièrement sommée de se formaliser, en utilisant diverses formes logiques, voire, à la suite de l'idéographie peircienne, en utilisant des diagrammes et des icônes.

En attendant ce moment ultime, les "langages" de représentation sémantique mêlent souvent les mots et les symboles logiques, aussi bien en sémantique structurale (Wotjak), que formelle (Bierwisch, Petöfi, Jackendoff). Les formalismes des réseaux sémantiques, comme les graphes conceptuels de Sowa ont systématisé cet usage mixte de mots (devenus concepts par l'usage de majuscules) et de symboles.

Comme tous les mouvements utopiques, ces grands courants de réforme du langage se sont montrés extrêmement féconds. Leur ampleur même leur confère des enjeux politiques. Déjà la combinatoire universelle de Lulle entendait assurer la concorde des religions abrahamiques. L'irénisme bien connu de Leibniz, tant raillé par Voltaire, préside à son projet d'une caractéristique universelle.

De nos jours la philosophie analytique, conçue comme analyse rationnelle du langage, scientifique ou ordinaire, est régie par des préoccupations morales et politiques dont témoignent aussi bien l'oeuvre de Russell que celle de Wittgenstein ou que celle de Carnap. L'entreprise de Wüster, comme l'a souligné Slodzian (1995 b), partage naturellement l'irénisme du Cercle de Vienne dont il fut le fondateur. Après les dévastations sans précédent de la première guerre mondiale, ces savants avançaient l'idée que la science et la technique pourraient apporter dans les rapports humains la transparence, la vérité, et la paix. Dès lors, leurs langages, convenablement décrits, pourraient devenir un modèle de cette clarté aléthique.

Perfectionner la langue, c'est par ces voies diverses la soustraire à l'interprétation, soumise à des variations individuelles et historiques, et ainsi lui permettre de refléter sereinement la vérité dans sa permanence.

En somme, une langue parfaite se caractérise de cinq manières concordantes :

(i) Elle est internationale, pour des raisons tant mythiques (rédimer Babel) que pratiques (assurer une communication facile au sein de l'humanité).

(ii) Elle est véridique, car elle dénote exactement ses objets.

(iii) Elle reflète correctement la pensée, ce qui permet de la dire auxiliaire (par son rôle idéographique).

(iv) Elle est inaltérable dans le temps et invariable dans l'espace, en ceci qu'elle n'est pas soumise aux variations dialectales (que craignait tant Tracy) ; et cette uniformité est redoublée par le fait qu'elle ne connaît de variations diachroniques (ou du moins, elle est considérée en diachronie).

(v) Elle est artificielle, car seule une volonté normative peut assurer qu'elle reste inaltérable et invariable -- cette permanence assurant qu'elle reflète correctement l'Etre dans sa perennité.

Tous ces traits caractéristiques sont reformulés par Wüster et ses successeurs pour ce qui concerne la terminologie.

D. Des rencontres spéculaires ?

La rencontre récente de la terminologie avec l'IA est sans doute d'autant plus chaleureuse et productive qu'elles cousinent : l'IA emprunte la voie formelle du perfectionnement, la terminologie la voie réformatrice ; ainsi, elles partagent des préoccupations communes en empruntant des voies différentes, mais convergentes. D'une part, elles partagent un objectif de clarification et d'univocité, apparent dans la représentation des connaissances. Elle doivent cela à une même préoccupation de transparence ontologique. D'autre part, le modèle taxinomique leur est commun : il a présidé aux terminologies comme à la structuration des réseaux sémantiques (conçus dès l'abord par Quillian comme des modèles de mémoire lexicale ).

On peut à ce propos parler d'ontologie classificatoire. Une telle ontologie est fixe et finie, mais on ne saurait regretter le figement de ses arborescences ou de ses réseaux, dans la mesure où leur construction même répond à une volonté de figement. La base de cette sorte d'ontologie est la distinction entre les entités et les relations. Le caractère discret des entités que reconnaît l'atomisme logique ne limite aucunement leur richesse relationnelle. Les monades leibniziennes n'étaient-elles pas toutes liées entre elles ?

Plus généralement, on pourrait soutenir que toute discipline scientifique a une fonction ontologique, dans la mesure précisément ou elle produit son objet -- qu'elle l'exhibe ou l'engendre, peu importe ici. L'ontologie est créée par la discipline, et subsidiairement par la terminologie qui en exprime les concepts. Le réseau qu'ils dessinent établit ce point de vue général et partagé qu'on appelle l'objet de la discipline.

Cependant, sous le rapport de l'ontologie, langues et langages ne connaissent pas le même régime. Les langages ont une ontologie unique et homogène déduite de leur axiomatique. En IA, on ajoute à cela l'ontologie a priori du domaine d'application, et l'on résume sous le nom d'ontologie l'ensemble des primitives de ce domaine. Un des rôles de la terminologie peut être justement de formuler l'ontologie du domaine d'application.

Si l'ontologie des langages peut être cernée, c'est qu'elle est le décalque réaliste de leurs principes de construction : elle redouble simplement leur axiomatique.

Les langues pour leur part ont-elles une ontologie ? Ou bien les ayant toutes, pour ainsi dire, n'en ont-elles aucune ? Le problème de l'ontologie diffère selon les paliers de description : certains signes se prêtent à une sorte d'ontologie, celle de la référence ; la phrase à une ontologie basée sur la vérité ; le palier du texte enfin à une ontologie des mondes. Et ces paliers ontologiques sont relativement indépendants : par exemple, dans un texte de fiction, on peut rencontrer des phrases "vraies".

Enfin, et nous allons développer ce point, la terminologie et l'IA pratiquent chacune à leur manière le suspens de l'interprétation. La première la réifie, en normant les rapports entre type et occurrence, de telle manière qu'à toute occurrence d'un terme corresponde un type et réciproquement. La seconde, conformément à son option formelle, la suspend, car l'interprétation des formalismes (sinon par d'autres formalismes) n'est pas du ressort des disciplines formelles. Un des rôles de la terminologie est de mettre fin à ce suspens sans tomber dans l'équivoque, ou du moins en évitant les difficultés que rencontre toute pratique d'interprétation.

II. Du mot au terme, et du terme au concept

A. La construction du terme

Comment un mot devient-il un terme ? La normativité terminologique le promeut à ce rang par quatre opérations concomitantes.

(i) La nominalisation donne pour forme canonique du terme le nom substantif. Les autres classes morphologiques exprimant le terme sont rapportées à la forme nominale de son expression. Comme le nom est réputé représenter un objet, la nominalisation est fort utilisée pour créer un effet d'objectivation : c'est pourquoi elle est massivement attestée dans les textes scientifiques (notamment positivistes) et dans les discours qui les imitent (langues de bois).

(ii) La lemmatisation permet ensuite, outre sa commodité lexicographique, de dépouiller de ses variations accidentelles la substance que le terme est censé représenter. En effet, la variation des affixes a toujours été pensée comme une variabilité des accidents qui affectent une substance. Le fait même qu'on les définisse comme des affixes, et non comme des co-variants, souligne assez qu'on les considère comme inessentiels. Felber affirme ainsi : « le terminologue [...] ignore les déclinaisons et la syntaxe » (1987, p. 82).

Quand un verbe s'est glissé dans une terminologie, il est lemmatisé, comme dans les dictionnaires sous sa forme nominale (dite substantive par Guillaume), l'infinitif, dépouillée de ses affixes temporels et modaux.

(iii) La décontextualisation permet de définir le terme par lui-même, indépendamment des variations qui pourraient affecter ses occurrences : variations de position dans le texte, de niveau de style, de ton, de mode d'énonciation représentée, d'évaluation. Bref, un terme n'a pas de contexte, il n'a que des pères, des frères, et des fils ; et les relations qui le lient à ces termes apparentés sont seules recevables et pertinentes. Le réseau terminologique qu'elles constituent exprime l'idéal d'une composante connexe des définitions. Les entités terminologiques ainsi interdéfinies sont alors soustraites à leurs accidents textuels.

(iv) Enfin, et cette dernière opération couronne le processus, la constitution du mot en type , et l'affirmation corrélative que toutes ses occurrences sont subsumées sous ce type -- ou du moins que celles qui ne le sont point témoignent d'un emploi incorrect. La définition est le moyen principal de cette constitution en type : elle énonce, conformément au principe du positivisme logique (Carnap, Morris), les conditions nécessaires et suffisantes pour que le terme soit pourvu de sa dénotation correcte. La notion (ou concept) est la signification du symbole (ou mot) : la seule relation sémantique reconnue par Wüster dans son modèle du terme est la relation (nommée Bedeutung ) entre la notion et l'objet individuel. La notion est donc bien un type.

Dès que la définition est arrêtée, le terme est soustrait à l'interprétation. La définition fait du mot l'abréviation d'une proposition, et non plus un moment variable d'un texte. Un point crucial reste cependant dans l'ombre : comment la signification est-elle transférée du définissant au défini ? Par quel biais transmet-elle sa référence ? Comme la doctrine terminologique ne comprend pas de théorie du contexte, elle ne peut poser cette question.

Remarque . --La théorie de la définition semble inconciliable avec une théorie du contexte et du texte. La théorie de la définition suppose en effet que la signification puisse être indépendante des contextes, ou qu'elle les contienne pour ainsi dire en germe (cf. le signifié de puissance en psychomécanique guillaumienne, le sens schématique en sémantique cognitive). Elle suppose une approche transcendantale du signifié, car toute définition a besoin de primitives. Dans le positivisme logique, la théorie de la définition semble l'homologue pour les langues de la théorie axiomatique pour les langages formels (cf. Hilbert). Les antinomies de la théorie des ensembles ont certes ébranlé la théorie de la définition comme procédé méthodique ; mais dans les sciences du langage, sa légitimité épistémologique reste insoupçonnable, dans la mesure précisément où ces disciplines ont des objectifs normatifs.

La définition nous paraît bien plutôt un genre textuel, fort codifié, qui prescrit la parataxe, la propagation de traits du définissant au défini, et exclut les marques de l'énonciation représentée. Comme tout genre textuel, elle suppose un contrat interprétatif : il prescrit en l'occurrence de considérer l'équivalence entre le définissant et le défini comme une identité.

Un mot-occurrence ne se définit que dans et par un contexte, et reçoit des déterminations du texte. Le placer sous l'autorité d'un type revient à le décontextualiser et à le détextualiser.

Par ailleurs, la constitution d'un objet en type est une des formes de l'abstraction. Or, abstraire, c'est déclarer inessentielle une partie de l'objet. Les occurrences qui ne correspondent pas à la norme réifiée dans le type seront dites atypiques, ou, si l'on décide d'assouplir la norme par une théorie du prototype, peu prototypiques.

La différence entre sens et signification est produite par la différenciation entre type et occurrence : le sens est propre aux occurrences, et la signification au type. La subsomption de l'occurrence sous le type place le sens sous la dépendance de la signification, le phénomène sous la dépendance de la norme.

Ces quatre opérations ont pour effet, sinon pour but, de créer un effet de réel particulier, celui de l'entité. En effet, le type a toutes les propriétés que l'ontologie positiviste traditionnelle attribue à l'entité : identité à soi, indépendance à l'égard des variations spatiales, temporelles, modales, etc. L'institution des types fixe ainsi l'être, conformément au préjugé scientiste que les invariants sont l'objet de toute recherche.

Cependant, le rapport du type à l'occurrence s'éclaire si l'on considère que les types ne préexistent pas aux occurrences, mais sont reconstruits à partir d'elles. Ainsi tout type résulte d'une décontextualisation, comme toute entité, d'un oubli des "accidents". Le mot-type est ainsi un artefact des linguistes, comme le terme est un artefact de la discipline qui l'instaure.

Bref, un mot devient un terme quand il n'a plus de passé, et qu'on lui attribue une signification indépendante des variations induites par les acceptions et les emplois en contexte. Il est ainsi soustrait aux contraintes spatiales (dans le texte) et temporelles (en diachronie).

B. Du terme au concept

Le terme est une unité factice de médiation entre la pensée rationnelle et le langage. Nous venons de retracer le passage du mot au terme, passons à présent du terme au concept. Selon la conception instrumentale du langage, le concept préexiste au terme. On sait que le terme est réputé exprimer univoquement un concept.

Si l'on convient que le terme est un mot soumis à restrictions, l'analyse qui précède appuie notre affirmation que le concept est un signifié normé (l'auteur, 1991). Techniquement, le signifié du mot élevé au rang de terme est une sémie construite. Nous suggérons alors que les "concepts" à traiter sont des signifiés normés par les disciplines, reconnus par la terminologie, et que leur valeur de connaissance n'est pas du ressort de la terminologie.

En somme, un concept est le signifié d'un mot dont on décide de négliger la dimension linguistique. Si bien qu'un concept n'est pas la source du terme, mais le produit de son instauration. C'est le travail terminologique qui transforme la notion en concept. Après avoir relié à une même notion plusieurs expressions jugées synonymes, on institue un concept en choississant l'une d'entre elles comme terme, et en reléguant les autres au rang de pseudo-termes (cf. langage objet, à objet, orienté objet ).

Au delà, l'institution des termes peut être décrite comme un processus ontogonique. De la décontextualisation du mot devenu terme résulte l'universalité présumée du concept. En étendant l'intuition lockienne, on pourrait affirmer que toute essence est nominale. Et il conviendrait alors de s'interroger sur les moyens linguistiques de constitution des ontologies.

Ce problème n'intéresse pas que les discours scientifiques et techniques. La fixation de la signification est opérée par des systèmes de normes, que le réalisme propre à notre tradition métaphysique transforme en états de choses : sur ce plan, les disciplines scientifiques et techniques ne diffèrent pas dans leur principe des idéologies (religieuses, politique, supposant un magistère quelconque, sous la forme d'obédience religieuse ou de doctrine politique). Du moins, le scientisme et le technologisme, dans la mesure où ils font appel à une ontologie naïve, ne diffèrent point des idéologies, sinon par le caractère non-critique de cette ontologie spontanée.

Par un forme complémentaire du réalisme, non plus empirique, mais transcendant, l'institution des termes établit également le champ dit conceptuel. Dans les recherches cognitives, par exemple, on appelle en effet concepts des termes mis en majuscules, et souvent en anglais, qui sont censés représenter des catégories mentales.

III. Le terme , le texte et l'interprétation

A. L'évidence du terme

L'institution du terme, en normant sa signification, a deux effets corrélatifs : elle l'isole, et le dispense d'interprétation. Une fois établie, la signification n'a plus à être construite, et les variations de ses contextes sont récusées. La solitude du signe et le suspens de l'interprétation vont de pair. Or nous estimons qu'un signe en tant que tel ne peut être interprété, puisque l'isoler le coupe précisément de ses conditions d'interprétation, de son contexte, c'est-à-dire du texte. En d'autres termes le signe n'est pas l'objet de l'interprétation ; il est lui-même un artefact normatif de la tradition ontologique, indéfiniment préoccupée par les rapports entre le concept, le signe, et la chose.

La signification, toujours déjà donnée, perçue par simplex apprehensio sur le mode de l'évidence, est appelée sens littéral . Si nul ne songe à décrire sa construction, c'est qu'il n'a pas à être construit. Toutefois, le sens littéral varie avec les pratiques, voire les individus (tel chercheur en informatique ignorait que sauvegarde pût avoir un autre sens que l'enregistrement de données) ; et cependant, on fait comme s'il n'y avait pas de polysémie et de construction du sens dans les textes de spécialité.

En revanche, le sens dit dérivé appartient aux occurrences. Soit l'on considère que le sens doit être distingué des interprétations, en reprenant la distinction entre sens littéral et sens dérivé. Alors, nous préférerions dire que le sens littéral est un moyennage temporaire des sens "dérivés", puisque le type est construit à partir des occurrences.

Le sens d'un mot ne lui est pas immanent : il est toujours le produit d'une interprétation, cette interprétation fût-elle fondée sur des inférences par défaut, qui permettent d'hériter des traits sémantiques d'un type lexical préconstruit. Si le sens résulte d'une interprétation, pour en rendre compte, il convient de décrire les parcours interprétatifs et les contraintes linguistiques sur les parcours. En diachronie, le sens d'un mot est constitué par l'histoire de ses interprétations. Prendre pour point de départ une signification conduirait à oblitérer cette histoire.

B. La syntagmatique et le problème de la textualité

Dans le champ de la terminologie, quelques auteurs, comme Kocourek, se montrent à bon droit attentifs à la description des textes : cette préoccupation devrait conduire à reconsidérer les principes fondateurs de la terminologie, et notamment sa définition même de la signification.

Nous définissons la sémiosis non comme la relation entre signifiant et signifié, mais comme le réseau des relations entre signifiés au sein du texte. Nous étendons ainsi au texte la problématique saussurienne de la valeur, fondement de la sémantique différentielle -- les signifiants étant seulement les interprétants qui permettent de construire certaines de ces relations. Nous concevons ces relations comme des parcours orientés. Ainsi, la sémiosis peut être définie comme un résultat de l'interprétation, non comme son point de départ.

Bref, dans la perspective interprétative, un mot ne se définit pas par rapport à des états de choses ou à des états mentaux, mais par ses contextes. Les dictionnaires classent ces contextes, et chaque acception résume les éléments communs à une de ces classes. Le mot reçoit en outre des déterminations du texte ; c'est pourquoi l'ambition scientifique de la lexicologie doit la conduire à partir des textes, condition pour permettre d'y revenir utilement.

La lexicographie elle-même, en tant que discipline appliquée de la lexicologie, gagne à partir des textes (comme l'a fait le TLF) ; et elle est utile, notamment, si elle permet d'y revenir. Certes, il reste trace du texte dans la définition lexicographique. Par exemple, les indicateurs de domaine (comme mar. pour marine ) correspondent à des types de discours, et, au-delà, à des types de pratiques ; bien que réduites à la phrase, les citations témoignent aussi de la rémanence du texte (Littré, TLF).

Comme les textes (écrits ou transcrits) sont l'objet empirique de la linguistique, dans la mesure où la terminologie en relève, son objet n'est pas les langues de spécialité, qui au demeurant ne sont pas des langues mais des normes sociolectales : il est constitué par les textes spécialisés (et tous le sont dès lors qu'ils sont définis en tenant compte des pratiques où ils sont produits et interprétés). Cependant, et de fait, « le discours n'est pas une dimension de la terminologie » (Otman, 1995, p. 43).

Un déplacement de problématique pourrait alors faire évoluer la description. La discussion a porté essentiellement sur la paradigmatique : structure des systèmes conceptuels, arborescences, héritage et transitivité. Or la conception taxonomique des structures conceptuelles ne convient guère à la structure sémantique des langues, et assez mal à celle des discours "de spécialité". Il n'est pas certain par exemple que les différents niveaux de l'arbre appartiennent à une même pratique ; du moins, hors d'applications didactiques, les termes superordonnés sont généralement sans intérêt pour les experts.

Aussi pourrait-on compléter cette problématique par une syntagmatique. Elle étudierait :

(i) La constitution des termes. -- Les termes sont bien souvent extraits arbitrairement de lexies phraséologiques particulièrement abondantes dans les textes scientifiques ou techniques : dès que ces unités distributionnelles sont restituées, on s'aperçoit que la plupart d'entre elles sont des hapax, et demandent donc une autre approche que la terminologie classique.

(ii) Le rapport des termes aux non-termes . -- A ce propos, les "langues" de spécialité sont sans doute hétérogènes. Par ailleurs, la décision d'élever certains mots au rang de termes ne leur confère pas une étoffe particulière : les interactions sémantiques constantes entre termes et non-termes sont cruciales, surtout si l'on veut éclairer l'émergence et la disparition des termes.

(iii) Le rapport du terme au contexte. -- Les déterminations locales qu'il en reçoit définissent pour une part son sens, et de fait les définitions satisfaisantes ne font que résumer ces déterminations.

(iv) Le rapport du terme au texte . -- Les déterminations globales que le terme reçoit du texte définissent la part complémentaire de sa signification. Elle dépend de la position du terme, de ses liens avec les structures textuelles, qui se traduisent notamment par des préférences actantielles ; enfin, de ses rapports avec le genre du texte, qui peut éclairer l'évolution diachronique des terminologies.

Par exemple, tel terme est-il présent dans tous les genres du discours scientifiques (oral / écrit, didactique ou non) ? Dans les textes où il est présent, a-t-il une distribution régulière ou en rafales ? Quelles sont ses collocations remarquables ? Sur toutes ces questions, les outils statistiques, les concordanciers, et les logiciels d'aide à l'analyse sémantique permettent d'apporter du nouveau (cf. l'auteur, 1995), pour peu que les stratégies de recherche tiennent compte de la textualité.

La réintroduction, avec une syntagmatique, de la dimension textuelle, suscite des questions généralement éludées par la terminologie, comme celles qui suivent.

Les termes au sein d'un même texte connaissent entre eux des inégalités qualitatives. Les textes de spécialité et les normes de spécialité ne sont en effet aucunement neutres et purement représentationnels. Ils contiennent des effets rhétoriques, connotatifs, constants : les experts sont les seuls à les maîtriser, et doivent sans doute une bonne part de leur "expertise" à cette maîtrise. On a souvent remarqué que le langage des experts fourmille de tropes. Il a bien d'autres aspects rhétoriques. Par exemple, les textes scientifiques sont aussi argumentatifs que persuasifs.

La maîtrise de ces aspects revêt évidemment une importance cruciale pour ce que les sociologues des sciences ont nommé la science en action. Ainsi le terme système-expert , encore plein de lustre voici dix ans, fait à présent vieillot : il faut donc se garder de l'employer dans une réponse à un appel d'offres. En revanche, on multipliera les emplois qui dénotent une familiarité avec les aspects les plus récents du domaines (lexies émergentes). En règle tout à fait générale, les usages terminologiques sont liés aussi à des politiques académiques. Ces problèmes sont certes familiers à ce qu'on appelle la socio-terminologie, mais les rapports entre la terminologie et la socio-terminologie ne sont pas des plus clairs.

Ajoutons à cela le fait négligé que le régime terminologique des textes varie selon les genres et les discours. Par exemple, la sémantique des textes techniques et celle des textes scientifiques n'est pas la même. En outre, dans un même domaine technique ou terminologique les genres diffèrent.

Enfin, pour trouver des applications, la terminologie doit aussi tenir compte de facteurs dits "pragmatiques" et de leur incidence sur les relations systématiques qu'elle établit. Comment, sans étudier les textes, structurer le lexique, et surtout définir des sphères de pertinence pour éviter les propagations oiseuses dans les réseaux terminologiques ?

Au delà, la sémantique textuelle pourrait contribuer à redéfinir le terme, sans recourir aux postulats ontologiques étudiés plus haut. Par exemple, on peut définir le terme comme un thème (molécule sémique dont rend compte la composante thématique) qui dispose d'une ou plusieurs lexicalisations synthétiques, et dont tous les corrélats relèvent du même domaine sémantique. Corrélativement, un concept serait un terme ainsi défini. Ce que l'on appelait l'universalité du concept n'est qu'une forme de généralité : elle découle de la traductibilité des textes scientifiques ou techniques relevant d'une même discipline organisée par des normes internationales.

Quoi qu'il en soit, on peut gagner à lier à la sémantique textuelle la sémantique lexicale et la terminologie qui en procède. Dès que l'on restitue la dimension textuelle se trouve posée la question de l'intégration du terme aux unités textuelles -- bien que l'atomisme logique de la philosophie du langage considère les mots, du moins certains, comme des unités "pleines" de sens qui assurent la dénotation, à partir desquelles, muni des règles syntaxiques correctes, on pourrait calculer la valeur de vérité des propositions.

Or les unités textuelles, dans une problématique de reconnaissance de formes, et non plus de calcul, se ramènent à des fonds et à des formes. Les termes à distribution régulière participent à la constitution des fonds (isotopies génériques), et les termes à distribution irrégulière lexicalisent en général des parties de formes (molécules sémiques). Si les textes techniques et scientifiques utilisent préférentiellement certaines lexicalisations synthétiques, la correspondance entre les unités microsémantiques (dont les termes comme sémèmes construits) et les unités macrosémantiques (comme les acteurs ou les fonctions dialectiques) n'est jamais univoque : la différence des paliers de complexité interdit de considérer que le texte se résume aux mots qui le composent.

IV. Questions d'épistémologie

Nous sommes maintenant en mesure de revenir aux questions initiales de cette étude.

Bien qu'ils ne manquent pas de s'appuyer sur des linguistes, Wüster et ses disciples opposent volontiers la terminologie et la linguistique. Mais instituer la terminologie en discipline autonome à l'égard de la linguistique irait à l'encontre de la clarification théorique nécessaire. Une sécession de la terminologie causerait un préjudice à l'ensemble des sciences du langage. Alors que ses objectifs pratiques relèvent à la linguistique appliquée, les préjugés logico-positivistes de sa doctrine doivent être abandonnés, d'une part parce qu'ils entravent la réalisation même de ses objectifs, d'autre part parce qu'ils donnent du langage une image à la fois simpliste et obsolète, sans permette de comprendre la richesse et la complexité du fonctionnement effectif des textes de spécialité.

Le cercle de Vienne postulait l'unité de la science. Empiriquement, ce postulat normatif reste invalide, et une linguistique des textes doit pouvoir différencier les modes discursifs qui caractérisent les disciplines dans leur diversité. Comme le rapport des disciplines à leur terminologie reste variable, une étude comparée des régimes terminologiques des disciplines et de leur travail "métalinguistique" serait utile : elle commande en effet la terminologie qui en recueille les résultats.

La réflexion sur les normes constitutives des disciplines doit accompagner une réflexion sur l'activité normative de la linguistique. Traditionnelle en grammaire, jusque dans les recherches contemporaines sur la grammaticalité et l'acceptabilité (de Chomsky à Milner), l'activité normative nous paraît tout à fait légitime dans les applications, mais non pour les théories. Il nous semble que l'ontologie non critique qui a présidé à l'institution de la terminologie comme discipline la range dans les disciplines appliquées : encore faudrait-il s'assurer que cette normativité philosophique générale, qui appartient à l'ordre de la croyance, n'entrave pas la mise en place des normes requises par les applications. Les limites des applications ne doivent pas engager la linguistique théorique à se résigner allègrement au réductionnisme.

Alors que la lexicologie est une discipline théorique, à objectif descriptif, la lexicographie est une discipline appliquée à objectif normatif. Aussi, les problèmes théoriques ne se posent pas de la même manière en lexicologie et en lexicographie, où ils sont sous la dépendance des objectifs techniques. Par exemple, la polysémie est un problème fondamental de la lexicographie, alors qu'en lexicologie il n'a qu'une importance secondaire, et il apparaît sous une tout autre forme, celui de l'équivocité, propre à certains discours.

Naturellement, hors des applications didactiques, la norme ne s'exprime pas par des prescriptions ou des interdictions ; elle se formule de deux manières : par le répertoire d'acceptions jugées canoniques, et par la présentation d'exemples considérés comme des parangons.

La terminologie se place du côté de la lexicographie ; elle en partage, en les radicalisant, les préjugés ontologiques et mentalistes. Là où elle parvient à les abandonner, elle devient une lexicographie onomasiologique, c'est-à-dire bien faite.

Que la terminologie soit normative comme la lexicographie mais onomasiologique comme la lexicologie, cela ne la place pas, bien au contraire, hors de la linguistique. Elle reste soumise aux mêmes formes de légitimation que les autres branches de la linguistique.

Comme toute entreprise d'ampleur, la terminologie contemporaine reste animée par des croyances qui l'inspirent, et parfois la dépassent ; mais passé l'enthousiasme initial, elles entravent son développement. En resserrant ses liens avec la linguistique, et notamment la sémantique des textes scientifiques et techniques, la terminologie va devenir mieux à même de remplir ses multiples missions, en problématisant la recherche et la constitution de ses unités, et en s'adaptant mieux à ses domaines d'action privilégiés : documentation et indexation, aide à la traduction.


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©  1996 pour l'édition électronique.

Référence bibliographique : RASTIER, François. Le terme : entre ontologie et linguistique. Texto ! 1996 [en ligne]. Disponible sur : <http://www.revue-texto.net/Inedits/Rastier/Rastier_Terme.html>. (Consultée le ...).