SÉMANTIQUE TEXTUELLE 2

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3. Le carré sémiotique

N. B. Lecture préalable très vivement conseillée : le deuxième chapitre de Sémantique structurale de Greimas, A. J. (1966) intitulé « La structure élémentaire de la signification ».


3.1. Rappel à propos des antonymes

On a vu que la signification reposait sur la différence, l’opposition, l’antonymie généralement : catégorie « haut/bas » par exemple.

L’antonymie est essentiellement représentée par deux types de relations : la relation de contradiction et la relation de contrariété:

- deux termes sont dits contradictoires lorsque l’affirmation de l’un équivaut à la négation de l’autre et réciproquement. Il n’y a pas de troisième position possible : par exemple, tout nombre est pair ou impair (ou exclusif), sans autre position possible (loi du tiers exclu : dire qu’un nombre n’est pas pair, c’est dire qu’il est impair). Cette relation est non gradable : un nombre n'est pas plus ou moins pair. Les termes ne peuvent être vrais ni faux ensemble (d’un nombre on ne peut dire ni qu’il soit pair et impair ni qu’il soit ni pair ni impair) ; cette relation peut se marquer lexicalement (majeur/mineur), au moyen d’un préfixe (pair/impair), d'une particule négative (blanc/non-blanc, ce dernier terme pouvant se représenter par une barre de négation au-dessus du terme).

- deux termes sont dits contraires (par exemple blanc/noir), lorsque affirmer le premier c'est nier le second, mais nier l’un n’est pas forcément affirmer l’autre : dire qu’un objet est blanc signifie qu’il n’est pas noir, mais dire qu’il n'est pas blanc ne signifie pas qu’il est noir, évidemment. En principe, les contraires ne peuvent être vrais ensemble, mais ils peuvent être faux ensemble (un objet peut n’être ni noir ni blanc). Les contraires sont incompatibles dans la signification réalisée, cependant l’un n’est pensable que comme contraire de l’autre (présence d’un axe sémantique ou dénominateur commun qui les rend homogènes : celui de la température pour chaud/froid, de la taille pour petit/grand - les termes sont comparables de ce fait). Les contraires ne s'opposent pas comme deux termes d'une alternative exclusive. Une troisième position est possible (par exemple, « gris » qui est ni noir ni blanc), ainsi que la gradation : un corps peut être plus ou moins chaud, plus ou moins blanc.

N. B. Nous avons pris, pour l'exposé, des couples de termes dont la relation antonymique et la relation contradictoire ou contraire « vont de soi ». Mais il arrive, et c’est le plus intéressant, que des termes sans relation antonymique codée soient présentés, par un coup de force discursif, comme des antonymes; il y a tendance à mettre en parallèle antonymique des termes qui ne se situent pas sur le même axe et, de plus, un effort pour transformer des contraires en contradictoires, ce qui ne laisse aucune place à la discussion, ou pour transformer des contradictoires en contraires pour, par la négation, trouver une troisième voie. Par exemple, les termes « beauté » et « confort » ne s'opposent pas en soi ; pourtant, on a pu voir une publicité pour soutien-gorge, de marque X, comportant cet énoncé : « Vous choisissez entre confort et beauté ? Moi pas ». C’est dire que jusqu’à l'apparition de la marque X, confort et beauté sont présentés comme ayant été en relation de contradiction pour ce type de produit  : il fallait choisir l’une ou l’autre qualité, exclusivement, et le nouveau produit défait la relation de contradiction et même celle d’antonymie (relations que ce discours publicitaire présuppose). Il faut voir comment les textes utilisent ou construisent, de façon plus ou moins originale, ces relations.

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