Yves-Marie Visetti : Formes et théories dynamiques du sens

6. Epistémologie et sciences cognitives

Qu’on me permette maintenant d’avancer par série de points. Cela m’évitera les tourments et les pièges d’un discours plus lié, qui pourrait paraître doctrinal ; et un peu plus de facilité, de clarté, viendront peut-être. Qu’on se rassure toutefois, on n’en viendra pas au niveau de l’aphorisme ou de la maxime, et malheureusement pas à celui de l’anecdote, qui pourrait être instructive. On circulera plutôt, librement, de la simple déclaration d’intention au programme de recherche, du résumé de thèses épistémologiques jusqu’à des considérations un peu plus développées. Certains passages relèveront de l’historiographie des milieux scientifiques traversés. D’autres s’approcheront d’une politique de la science, rêvée par l’un de ses fantassins.

6.1. Epistémologie, théories et modèles

C’est en tant que modélisateur que je suis venu aux sciences du langage et aux sciences cognitives. En ce temps-là (disons, à partir de 1985 pour ce qui me concerne), le développement des sciences de la cognition, l'influence qu'elles exerçaient sur d'autres champs disciplinaires (qui connaissaient les uns après les autres leur «tournant cognitif»), reposaient pour une grande part sur une activité de modélisation sans précédent, soutenue par la disponibilité croissante de l'outil informatique. Mais est-ce toujours le cas ? L’essor des neurosciences et de l’imagerie cérébrale n’a-t-il pas transformé la donne ? Peut-on, mieux qu’alors, distinguer les justes parts de la modélisation ? A titre de témoignage, je voudrais reproduire ici quelques extraits d’un texte rédigé naguère (janvier 1992) en compagnie de quelques collègues, avec qui nous tentions de créer un groupe de travail centré sur la modélisation des systèmes cognitifs et sociaux [59]. Nous cherchions en fait à promouvoir certaines classes de modèles (topologico-dynamiques), encore assez mal acceptés à l’époque. En même temps, nous appelions à trouver un meilleur équilibre entre épistémologie et modélisation, et à ne pas entretenir de confusions sur le statut des modèles. Voici ce que nous écrivions :

C’était donc en janvier 1992. Relisant aujourd’hui ce tract jauni, qui nous donne une occasion de réaliser à quel point ce qui est banal aujourd’hui (mais est-ce si banal ?) peut être appelé à disparaître une deuxième fois demain, je ne peux m’empêcher de revenir aux points suivants.

Le distinguo introduit entre modèles cognitifs ‘proprement dits’, et modèles d’épistémologie expérimentale, partait de l’intention excellente de justifier, et en même temps, de cantonner, l’autonomie du modélisateur dans l’exploration libre des grands paradigmes, et de leurs schèmes les plus génériques. Mais par le fait-même, on faisait quelque peu oublier qu’une part importante du travail, dans tous les cas, ne prend sens, et même souvent ne peut commencer, qu’avec un surcroît d’épistémologie et de théorie. Le problème est alors de savoir d’où on tire cette épistémologie, cette théorie, et comment, partant de là, on les élabore. Il est aussi d’admettre la complexité herméneutique de la modélisation.

Les leurres liés à la modélisation ne sont pas moins répandus aujourd’hui qu’hier, ni moins importants que ceux que peuvent véhiculer des théories non modélisables. Combien de collègues rencontrons-nous qui se montrent impressionnés par trois sous de formalisme ? Espérons en leur hypocrisie. Au-delà de ces attitudes ‘scientifiquement correctes’, c’est toute la place singulière de la théorie qui se brouille, en raison d’une indexation privilégiée du travail scientifique sur les modèles. Qu’est-ce que la théorie, dans ces conditions ? Si c’est de l’épistémologie, on sait ce qu’il en advient dans l’urgence artificiellement entretenue du processus scientifique ‘primaire’. Si c’est toujours déjà de la modélisation, c’est d’emblée l’asservir aux instruments et aux schèmes d’objectivation en place. Une théorie doit alors ressembler à un modèle qui l’exploiterait (c’est à peine, d’ailleurs, si l’on peut encore marquer ces distinctions pour les théories formalisées : il ne reste plus que l’effectivité informatique, qui est censée montrer que ‘ça marche’). En somme, lorsque la modélisation définit les objectifs, la théorie doit être quelque chose de déjà disponible, qui doit pouvoir ‘s’appliquer’, peut-être même ‘s’implanter’, tout simplement. Or, une théorie, en sciences humaines en tout cas, n’existe qu’en tant qu’on l’élabore ; plus encore, elle n’existe vraiment que pour ceux qui l’élaborent et la discutent, et non pour ceux qui prétendent l’appliquer.

Plusieurs voies, furtivement mentionnées dans notre texte, sont devenues à présent non problématiques dans de larges zones institutionnelles. Citons :

Reste évidemment à comprendre les sens divers que prend cette interaction. S’agit-il d’une submersion totale des problématiques par les divers cognitivismes ? Toujours pas, pas encore. Les turbulences que j’ai traversées, dès le milieu des années 1980, était effectivement liées à l’affrontement des cognitivismes rivaux, plus tard compliqué par l’essor des problématiques émergentistes, constructivistes, énactivistes, qui sont venus leur disputer le terrain (cf. supra, fin de la section 4). Or il semble qu’un modus vivendi ait été trouvé depuis, sous l’égide de la naturalisation et des neurosciences. Des niches écologiques relativement exiguës accueillent les autres sensibilités. Si l’on voulait localiser une frontière polémique qui serait l’analogue de celle sur laquelle nous nous tenions alors, c’est à l’articulation des sciences de la culture et des sciences cognitives qu’il faudrait désormais se placer (cf. infra, 6.4).

Nous avons évoqué plus haut le risque d’un écrasement de l’épistémologie sur la modélisation (dans les milieux cognitifs ou linguistiques concernés de près par la modélisation, et peut-être même ailleurs), et souligné ce qui l’accompagne le plus souvent : l’effacement, ou la complète délégation à d’autres, du moment théorique. Des remarques comparables peuvent être faites à propos de la philosophie, quand elle s’aventure sur les mêmes territoires. Nous avons pu observer plusieurs scénarios peu satisfaisants. Rejetée par exemple dans un arrière-plan culturel, où elle tient lieu de faire-valoir à tel ou tel paradigme, elle n’en sort que pour se faire illico naturaliser. L’idée qu’un écart, ou qu’un reste, puisse être alors scientifiquement intéressant, et doive être explicité à ce titre (et non, ce qui serait autre chose, pour défendre le sens philosophique contre une appropriation scientifique indue), ne semble pas passer par la tête des intéressés, tant est fort le préjugé que l’intérêt scientifique de la philosophie passe désormais entièrement par une naturalisation. Ou alors – autre cas de figure – il arrive que la philosophie n’ait pas à être naturalisée, car elle l’est déjà. Présente au laboratoire dans le rôle d’intellectuelle organique, elle ne dédaigne pas d’enfiler la blouse blanche, et se trouve occupée à rédiger elle-même les programmes de recherche, pour en prêcher d’avance les conclusions. Ce qui a disparu dans tout cela, c’est l’idée d’une distance critique, d’une réflexion sur ce qui ne va pas, d’une prise en charge, par tout discours, de ses décalages vis-à-vis de ceux auxquels il s’adresse. Qu’y faire ? Revenant en tout cas au jeu théorique, davantage de ma responsabilité ces dernières années, on pourrait suggérer que toute théorie modélisée doive se prêter au jeu de relativiser ses modèles. Symétriquement, on devrait pouvoir comprendre, que ce soit directement de ses auteurs, ou bien par d’autres, comment une théorie se détache, par son projet et sa portée, des philosophies dont, à juste titre, elle se recommande.

Ballotté par des temps incertains, et manquant de philosophie véritable pour s’orienter dans la pensée (mais est-ce de son ressort ?), le pauvre fantassin des sciences cognitives peut encore pratiquer ce que l’on nomme épistémologie : résidu philosophique interne à la science, ersatz de philosophie, qu’on s’obstine à trouver utile. Quelques exercices ne semblent pas de trop. J’en résume brièvement les moments saillants.

6.2. Fonctionnalismes

Le fonctionnalisme a été la philosophie canonique, et même organique, des premières sciences cognitives. Dans sa guise dominante, il repose sur deux grandes exclusions : celle d’abord de la complexité biophysique interne, notamment du cerveau, factorisée pour l’essentiel à travers un supposé langage de la pensée de facture logico-symbolique, qui impose partout son format ; celle ensuite de l’extériorité physique ou sociale, ramenée à ses conditions ‘sensorielles’ proximales. On postule alors qu’il est possible d’identifier des états mentaux, dont seule importe, finalement, la position respective dans le réseau causal qu’ils forment pris ensemble (la causalité se factorisant, elle aussi, à travers le format logico-symbolique).

La revue Intellectica a consacré aux fonctionnalismes un numéro spécial, publié en 1996, sous la direction d’E. Pacherie. Il s’est agi, en fait, d’une sorte de Mémorial de ces philosophies, car le temps de leur prépondérance semblait révolu, du moins officiellement. La plupart des philosophes qui en avaient encore tout récemment soutenu les thèses avaient en effet déserté, sans davantage d’explication (à l’exception remarquable de H. Putnam, qui accepta de commenter sa propre évolution : il fut rapidement mis au ban, pour avoir menacé les intérêts de ce qu’il dut lui-même appeler le ‘Syndicat’). Après un bref séjour du côté d’un externalisme passablement métaphysique (J. Fodor), la philosophie de l’esprit d’obédience analytique passa en masse du côté de la naturalisation et des neurosciences. Or, il fallait bien dire ce qu’il convenait de naturaliser. L’esprit-cerveau (le mind) des années précédentes ne pouvait plus à lui seul faire l’affaire : entité métaphysique, il était, par définition, toujours déjà naturalisé, mais sur le mode fonctionnaliste dont on entendait s’écarter. Il fallait bien coloniser d’autres terrains : on trouva en premier lieu la conscience, qui n’est pas l’esprit inconscient et computationnel ; on s’intéressa ensuite aux représentations ‘collectives’, comme par exemple les religions, en programmant de les élucider sur des bases exclusivement néo-darwiniennes. En réalité, l’esprit-cerveau fonctionnaliste ne s’est pas absenté du paysage : on y pense toujours, même si on en parle moins – il est toujours là en toile de fond, de même que le computo-représentationalisme. Mais l’imagerie cérébrale tarde à faire voir l’ordinateur qui est censé y calculer en permanence. On se contente donc pour le moment d’une notion vague de module, identifié au rôle fonctionnel supposé de telle ou telle région du cerveau. Ainsi peut-on continuer de suggérer qu’il y a bien en l’occurrence calcul.

Mais revenons aux fonctionnalismes. Conformément à l’usage de la revue, un appel à contributions libres, distinct du dossier proprement dit, fut lancé dans la communauté. Je répondis par un texte plus long que demandé, que l’on trouvera reproduit dans le Recueil qui accompagne ce mémoire (1996). Mon idée était de déplacer quelque peu le concept de fonctionnalisme, en usant d’une grille d’analyse qui me paraissait adaptée au tournant de la naturalisation ; à la faveur de ce déplacement, il s’avérait possible d’analyser toute une variété de fonctionnalismes de façon originale. Il en sortit un texte subdivisé en sept sections intitulées : la machine, les formes, les valeurs, quelques fonctionnalismes, postulats et exercices, pour une notion de champ, et polémiques. J’en résume rapidement les étapes essentielles, par un simple montage d’extraits.

Le texte part d'un premier repérage de l'espace des fonctionnalismes (d’ailleurs proposé, avec ma complicité, par E. Pacherie dans son appel à contributions), organisé autour de trois dimensions principales, présumées caractéristiques de cette famille de paradigmes cognitifs. Tout fonctionnalisme comprendrait ainsi un triple choix constitutif : choix d'un type de ‘machine’, choix d'un type de ‘formes’ aptes à s'y inscrire, et choix enfin d'un type de ‘valeurs’ susceptibles d'être attribuées à ces formes. Cette grille d'analyse met en avant la notion de forme, plutôt que celle de fonction. Le premier fonctionnalisme, celui du jeune Putnam, de Fodor ou Block, insistait plutôt sur l'irréductibilité des descriptions fonctionnelles. Mais les fonctionnalismes plus récents, avoués ou non, qui tentent de prendre le tournant de la naturalisation, se présentent au contraire comme des philosophies de la naturalisation : il leur est donc vital de faire reposer les fonctions sur des formes naturalisables, de préciser davantage quelles formes dans la nature peuvent ou non être recrutées au service d'une description fonctionnelle. Quitte à déplacer quelque peu la perspective, on entend les reconstruire aussi comme des philosophies de la forme, ou tout au moins cerner ce qui s'apparente en elles à une telle philosophie, car c'est de ce point de vue qu'on peut le mieux en analyser les interminables résurgences – quel que soit le nom qu’on leur donne.

Notons pour finir que ce texte se contentait de prendre au sérieux les prétentions matérialistes et naturalisantes des fonctionnalismes, pour les déborder sous le poids de ce qu'il leur faudrait laisser entrer pour répondre à leurs prétentions. Mais on aurait pu tout aussi bien mener l'attaque à partir de la culture [62], plutôt que de la nature, en reprenant d'ailleurs une bonne partie du parcours argumentatif effectué. En s’offrant à la ‘réfutation’, les fonctionnalismes, tout comme leurs rejetons plus immédiatement contemporains, jouent finalement un rôle positif, en nous permettant de comprendre toujours davantage, à partir de la critique que nous en faisons, à quel point la naturalisation et la culturalisation des recherches cognitives sont profondément solidaires (cf. infra, 6.4).

Le travail suivant (1999) tente, de façon positive cette fois, de repérer, au sein des recherches contemporaines en sciences cognitives, la mise en place d’un cadre constructiviste génétique. On cherche à en clarifier les enjeux – mieux comprendre et expliquer la genèse et l’individuation des formes – notamment en opposant et associant ce constructivisme à un autre, que nous avons appelé constructivisme assembleur.

6.3. Constructivismes génétiques

En fait, le travail présenté dans cette section tentait d’éclairer simultanément deux termes récurrents dans le champ des sciences cognitives contemporaines : ceux de constructivisme et d’émergence [63]. J’entendais expliciter certaines de leurs dimensions sémantiques et thématiques les plus générales, et développer ensuite des vues plus spécifiques sur l’évolution des recherches dans les quinze dernières années : problématiques connexionnistes, travaux sur l’émergence des fonctions symboliques, relance des conceptions gestaltistes de la forme et de l’organisation. Un état des lieux – déjà quelque peu daté – s’est ainsi dessiné : partiel inévitablement, il offre néanmoins une vue transversale sur un vaste champ pluridisciplinaire, où se trouvent conjuguées, et même nouées désormais l’une à l’autre de façon indissociable, ces deux notions de construction et d’émergence. En voici quelques aperçus.

La suite du texte, que nous n’avons pas la place de résumer, tente d’évaluer, à l’aune de ces considérations, un certain nombre de recherches de ces quinze dernières années [74]. On souligne l’équivoque de certains travaux émergentistes, qui annonçaient au début une coupure radicale avec l’explication par assemblage, et promettaient de donner enfin leur chance aux perspectives génétiques. Mais tout compte fait, la perspective qui en a résulté serait mieux qualifiée d’hybride ; elle reste fortement apparentée au constructivisme assembleur, que ces travaux viennent souvent compléter, plutôt que dépasser (l’exemple du connexionnisme à la PDP peut être cité une fois de plus). Sur le plan des thématiques, ce qu’on a appelé un temps l’émergence du symbolique a joué un rôle capital, et conduit, notamment, aux recherches toute récentes sur l’origine du langage. Il s’agit le plus souvent dans ce cas d’épistémologie expérimentale (cf. 6.1), c’est-à-dire d’une recherche sur le potentiel a priori d’un dispositif théorique, et non d’une modélisation à portée empirique (cf. mon article pour plus de détails).

Cherchant en conclusion à cerner encore une fois la rivalité entre les deux ordres constructivistes – assembleur et génétique – j’ai d’abord proposé de la considérer comme une rivalité de type dialectique. Chacun se nourrit des progrès de l’autre, mais sans parvenir à l’absorber. Toutefois, pour moi et très subjectivement, ce schéma dialectique n’épuise pas la question. Car le progrès, sinon la progression, ne consiste pas ici en un dépassement de l’un par l’autre, mais se trouve dans l’approfondissement de leur différend, comme dans celui de leur dépendance mutuelle. Or, c’est le constructivisme génétique qui, des deux, nous semble être le gardien de ce différend, et celui qui comprend le mieux sa dépendance vis-à-vis de l’autre. Ses liens avec la philosophie d’inspiration phénoménologique et herméneutique, dont il n’est finalement qu’une version naturalisée, lui évitent certaines naïvetés, lui donnent davantage d’ouverture et de précision dans ses stratégies interprétatives. Très subjectivement, encore une fois, nous lui donnons l’avantage au moment de déterminer le sens scientifique des travaux constructivistes.

6.4. Formes symboliques et sciences de la culture

L'examen de la situation théorique actuelle en sciences cognitives peut conduire à rechercher certaines de leurs conditions déterminantes sur les terrains des sciences sociales et de la culture. Qu’on le voie sous un angle prospectif ou rétrospectif, on nous accordera que cela paraît une suite fort naturelle de tout le cheminement retracé dans ce mémoire.

C’est pourquoi nous avons voulu, avec Jean Lassègue, organiser à l’ENS un séminaire qui reste lié au Département d’Etudes Cognitives de l’École, mais dont le point de vue soit celui d’une anthropologie sémiotique au croisement des sciences de la culture et des sciences cognitives. On y présentera des travaux théoriques et empiriques, non seulement en sciences du langage et en sciences cognitives, mais plus fondamentalement dans les diverses sciences de la culture qui en forment l’horizon déterminant : notamment, anthropologie, paléoanthropologie, éthologie, archéologie, linguistique historique et comparée. Nous avons intitulé ce séminaire Formes symboliques, en réminiscence de Cassirer [75], et nous avons mis en place, en juin 2002, un Comité de participants qui se sont engagés à participer régulièrement aux travaux, ou à organiser des séances (prévues au rythme de deux par mois). En voici la liste : F. Bailly (CNRS), P. Bourgine (CREA), P. Cadiot (Paris 8), J.P. Demoule (Paris 1), J.P. Dupuy (CREA), D. Lestel (ENS), C. Lenay, (UTC Compigne), G. Longo (CNRS-ENS), W. Miskiewicz (CNRS-ENS), B. Pachoud (Paris 7), F. Rastier (CNRS), C. Romano (Paris 4), V. Rosenthal (INSERM), J.M. Salanskis (Paris 10), F. Sebbah (UTC Compiègne), J. Stewart (CNRS), B. Stiegler (IRCAM).

Il s’agit donc d’une aventure collective, dont l’histoire reste à écrire. Je ne peux faire mieux ici que reproduire l’argumentaire que nous avons rédigé avec J. Lassègue, pour introduire au séminaire [76]. Le problème de la naturalisation s’y trouve évidemment soulevé.

Argumentaire  

Juste une remarque pour conclure cette section. Cassirer, dans ses écrits sur la Logique des sciences de la culture, et notamment dans l’article « Le problème de la forme et le problème de la cause » souligne que sous les noms de forme et de cause, il convient de comprendre « deux pôles autour desquels se meut notre compréhension du monde » (p. 177). Il recommande de comprendre les limites de l’explication causale, notamment en revenant à ses conditions langagières et herméneutiques, qui la rendent toujours dépendante d’un réseau de significations et d’intentions, qui détermine cela même qui peut être perçu, et doit être expliqué. Il insiste fortement sur la complémentarité irréductible de ces deux modes de connaissance, en le rabattant presque sur une opposition systémique entre synchronie et diachronie (p. 193) : le savoir ne se limite pas à celui des origines et du devenir, il concerne aussi la pure forme de l’existence – du moins ses formes génériques. Or, d’une façon d’ailleurs quelque peu confuse, Cassirer semble placer entièrement le devenir du côté de la cause, et condamner ainsi le mode de compréhension par la forme à ne capter que des articulations statiques, et des types strictement récurrents. Indubitablement, le contexte scientifique contemporain a changé cela : nous disposons à présent de modèles dynamiques qui donnent forme au devenir, et même ont pour objet premier la transformation prise comme telle, la genèse si l’on veut. Toutefois, il ne faut pas en confondre l’apport avec celui d’une explication causale, comme il a été dit déjà plusieurs fois dans ce mémoire. Dans bien des cas, la genèse modélisée reflète un a priori de l’engendrement de notre compréhension par participation réciproque de différentes phases (parfois bien matérialisées et localisées, comme dans une explication physique et causale stricto sensu). Cette genèse renvoie à un temps génétique, constitutif de ces nouvelles herméneutiques scientifiques, qui signifie qu’aucun moment n’est tout à fait premier, ni fondé par lui-même, mais qu’il provient toujours, non seulement d’un co-engendrement par les autres moments modélisés, mais aussi d’une production, d’une transmission laissées dans l’ombre par le modèle, et qu’un autre travail pourra éclairer, à la condition de susciter à son tour une ombre ailleurs.

6.5. Usages de la phénoménologie et de l’herméneutique [77]

Peut-on, avec les sciences cognitives et les sciences du langage contemporaines, hantées par le programme de la naturalisation, faire ce que fit P. Ricœur avec les sciences humaines de la grande époque française du structuralisme, qui avaient d’autres hantises ? Peut-on dégriser les unes, comme le furent les autres ? Peut-on, pour cela, reprendre son interrogation sur le destin de la phénoménologie, en prenant pour pierre de touche l’herméneutique ? L’herméneutique, selon Ricœur, ne ruine pas la phénoménologie, mais seulement la version idéaliste que Husserl en a livrée. Il y aurait entre ces deux grandes familles philosophiques une appartenance mutuelle qu’il faut expliciter, en partant de l’une comme de l’autre. Car, selon Ricœur, l’herméneutique préserve la phénoménologie dont elle s’éloigne, et qui reste sa présupposition indépassable, tandis que la phénoménologie elle-même ne peut rien constituer sans présuppositions herméneutiques (1986).

Certains ont même pensé, récemment, que la situation scientifique présente était favorable à la mise en place d’une réelle co-générativité entre toutes ces instances (N. Depraz et F. Varela, par exemple [78]).

Sans aucunement juger sur le fond ce qui existe déjà et va dans ce sens, que ce soit philosophiquement ou scientifiquement [79], je soutiens moi aussi qu’il vaut la peine de travailler dans cette direction. Le milieu international qui s’est construit ces dernières années autour du thème de la phénoménologie et de la naturalisation, pourrait abriter ces tentatives, à la condition d’abord d’accueillir plus explicitement qu’il ne l’a fait jusqu’ici (c’est un euphémisme) le ‘thème’ de l’herméneutique, à condition ensuite de donner aux questions linguistiques et sémiotiques toute leur importance à ce niveau fondamental.

Ainsi pourrait-on envisager, avec ces protagonistes ou avec d’autres, de faire un autre usage scientifique des grands textes de ces traditions philosophiques, tout simplement en les reprenant, c’est à dire sans prétendre les ‘appliquer’ ni nécessairement les ‘naturaliser’. Réciproquement, ce sont les philosophies elle-mêmes qui s’en trouveraient transformées, si elles découvraient dans les nouveaux montages scientifiques quelque motif à reprendre et à élaborer dans leur ordre de préoccupation propre. Car enfin, le croisement de la phénoménologie et de l’herméneutique reste à tenter, et il lui manque encore de quoi s’alimenter dans les cuisines de la science. Pourtant, certains s’y efforcent : que l’on suive par exemple la direction de mon regard en direction de certaines théories des formes sémantiques. Que se passerait-t-il, a fortiori, si le point de vue des sciences de la culture était véritablement pris en compte ? L’abondance viendrait.

D’où, en résumé, la déclaration d’intentions suivante :

et ainsi:

Ainsi, par exemple, nous avons adopté avec P. Cadiot un certain ‘style phénoménologique’ de théorisation. En quels sens cela peut-il s’entendre ? Les analogies abondent :

Cela étant dit, ni la phénoménologie husserlienne, ni celle de Gurwitsch, ni même celle de Merleau-Ponty, ne sauraient nous tenir lieu ici de fondation. Il convient d’abord de rappeler que la relation de la linguistique avec toute description de la conscience qui feint de ne pas la connaître dès le début comme sociale et langagière, ne peut qu’être des plus problématiques. Je ne reviendrai pas non plus sur la difficulté d’installer nos ‘phases’ sémantiques dans les strates de constitution husserliennes (cf. Cadiot & Visetti, 2001, notes pp. 65-66, 224).

Mais je soutiendrai que les concepts fondamentaux d’epoche, puis de constitution, doivent être repensés à partir d’une prise en compte originaire de l’activité de langage. Il faut, en réitérant ce mouvement, faire prendre à la phénoménologie un nouveau tournant herméneutique. On ne peut en effet faire du langage une préoccupation ultérieure, une strate de sens placée uniquement 'haut' ou 'loin' dans un parcours de constitution. Le langage ne se tient pas en opposition avec une couche de sens anté-prédicative qui lui préexisterait dans un état brut. Cette opposition est liée à une mauvaise conception de l'activité de langage et de la thématisation, vue comme une ‘sortie’ hors du langage et des langues ; elle s’enracine, symétriquement, dans une conception par trop brute ou « sauvage » de la perception (le mot est de Merleau-Ponty), qui méconnaît son caractère pratique et sémiotique, et ce qu'elle ‘devient’ chez l’être humain, à travers les normes sociales et linguistiques (on rappellera ici le discours intérieur incessant qui nous traverse) [80].

Ainsi, revenant à la problématique de Husserl lui-même, on devra reconnaître que c'est le langage qui permet l'epoche, et en autorise toute une variété, ne serait-ce qu’en raison de la diversité des langues et des cultures, qui en sont les médiations nécessaires. Mais le mouvement inverse est également possible, et l’on peut proposer que la faculté de langage aille de pair avec une disposition humaine à pratiquer une sorte ou une autre d’epoche [81]. Si l’on se déprend en effet des conceptions référentialistes, conceptuelles, ou utilitaristes de la sémantique, on peut commencer de penser que chaque langue est la trace d'une série collective d’epoche, et qu’elle nous délivre des parcours de constitution déjà esquissés, stockés dans son lexique, dans sa phraséologie, dans les discours et les textes des cultures par lesquelles elle passe, et qui en fixent les normes d’interprétation. Ces parcours de constitution nous sont transmis avec cette langue et ces cultures, et nous en reprenons le cours en la parlant. Encore faut-il comprendre en quoi la dynamique du langage et des langues s’apparente à un exercice epochal permanent, où la diversité des phases sémantiques conditionne les degrés d’un engagement thétique indéfiniment modulable, suivant les plans de thématisation où les locuteurs s’engagent. En même temps, nous arrivons, d’un individu à l’autre, d’une langue et d’une culture à l’autre, à synchroniser nos impressions et nos actions, à nous rejoindre les uns les autres. C’est, pour chacun, par la médiation d’une langue, et non pas seulement par l’action d’une imagination indépendante, ou par celle d’une nature corporelle (toutes instances cependant indispensables), qu’est possible cette modulation de l’engagement, ce jeu permanent avec la théticité et ses modes d’accès – aussi bien dans l’epoche à la Husserl, que dans l’epoche inverse à la A. Schutz, qui est suspension orientée du doute, adhésion immédiate à un ordre d'existence pris comme une évidence. La vie du langage, c'est en somme une circulation intersubjective continuelle à travers les différents niveaux de ce que des phénoménologues peuvent à bon droit appeler epoche  : en réalité une interminable série de petites epoche, arrêtées presque aussitôt, bientôt reprises à leur compte par d’autres locuteurs [82]. L’extrême diversité de formes qui en résulte renvoie à l’histoire, aux sociétés, aux cultures, aux genres. On ne peut les fonder : ce sont elles qui fondent, si besoin est. Elles ne se comprennent pas sans les ruptures, et les institutions du sens, qui font violence, et sans qui il n’est pas de fondation qui tienne.

Le langage et les langues sont donc là dès le seuil de l'entreprise phénoménologique, et il faut en tenir compte au moment de feindre (car nous avons aussi besoin de feindre cela) que nous ne sommes pas, au moment de prendre la parole, en réalité déjà des êtres parlants.

Mais ce n’est pas tout : c’est aussi la distinction noèse/noème qui me paraît devoir être critiquée, à la suite de Gurwitsch (1957), et pour le plus grand bien également des recherches cognitives qui entendent s’inspirer des analyses husserliennes. Cette distinction pousse, en effet, à penser que l’on peut distinguer, de façon univoque, procès psychologiques, d’une part, sens pour la conscience, d’autre part, pour les traiter ensuite comme des ‘corrélats’. Elle engage ainsi à considérer le sens comme un résultat, émergeant d’un processus qui ferait simplement fonction de support pour sa synthèse. Ce décrochement entre le psychologique (noèses) et le phénoménologique (noèmes), une fois naturalisé, ne peut qu’entraîner une fois de plus un décrochement de type fonctionnaliste, suivant le principe de conversion : noèses vs simples processus biophysiques ; noèmes vs structures émergentes de tel ou tel format significatif. Pour éviter cela, je propose d’élaborer, en repartant du dispositif de Gurwitsch, une notion de parcours de thématisation, qui me paraît ici beaucoup mieux appropriée. On peut alors concevoir comment serait en permanence négocié dans l’intersubjectivité, ce qui est à considérer, au sein même de l’activité de thématisation, soit comme thème, soit comme champ thématique, soit comme activité de constitution (jouant comme un aspect du parcours qui se détache frontalement dans le champ), soit comme halo médiateur, soit comme marge d’activité insignifiante, etc. Mais je n’en dirai pas plus ici sur ce travail en cours.

Pour clôturer la partie thématique de ce Mémoire d’habilitation, je souhaiterais, à titre de geste final, lancer une bouteille à la mer en direction des Amériques, en reproduisant le texte d’un Abstract, récemment envoyé à L. Embree, éditeur des œuvres de Gurwitsch en anglais, pour préparer mon intervention à son colloque Gurwitsch and Cognitive Science (Delray Beach, Floride, 3-4 octobre 2002). Invité, je n’ai finalement pas pu m’y rendre, car j’étais trop inquiet de voir approcher l’échéance de mon habilitation.

The Linguistic Fabric-and-Factory of the Thematic Field
(Language Activity and the Theory of Semantic Forms)

[Abstract]


NOTES

[59] P. Bourgine, A. Orléan, J. Petitot, F. Varela, B. Victorri, Y-M. Visetti. Propositions pour un groupe de travail en modélisation des systèmes cognitifs (janvier 1992). Document présenté au C.R.E.A. Il s’agit d’un manifeste bref (18 000 signes), qui visait essentiellement à enclencher une dynamique sociale, et non à exprimer les positions personnelles de chaque signataire.

[60] C’était un leitmotiv du premier CREA, qui fut un temps assourdi par le développement de sa composante cognitiviste.

[61] On connaît, de ce point de vue, la limite décisive des fonctionnalismes logiques : pour eux, la différence des niveaux ou grains de description se ramène toujours à une combinatoire finie (celle de la compilation, par exemple). Si bien qu'aucun niveau d'appréhension des formes ne semble pouvoir induire de décalage ontologique par rapport aux autres.

[62] A partir de la culture ou de perspectives parentes comme le collectif, le social, etc. (traces et architectures, territoires, rôles, hiérarchies, etc.).

[63] Sur les concepts d’émergence et de niveaux organisation, on pourra se reporter à F. Bailly, 1991a,b ; Bonabeau, Dessalles, Grumbach 1995.

[64] Cf. notamment Salanskis, 1999.

[65] Cf. Maturana & Varela 1994 ; Varela 1996.

[66] Nous renvoyons ici à l’exposé classique de P. Guillaume (1937) ; aux écrits de W. Köhler et K. Koffka ; à ceux plus récents de G. Kanizsa ; au panorama historique et philosophique de B. Smith (1988). A notre travail avec V. Rosenthal (1999, 2002).

[67] Sur les idées de Paul Weiss, et leur influence, on pourra se rapporter au livre de J.-P. Dupuy, Aux origines des sciences cognitives (1994) .

[68] L’argumentation serait en gros la suivante : les holismes, qui affirment l’irréductibilité des perspectives globales, tendent à refuser la sectorisation des phénomènes ; ils s’opposent a fortiori à leur réduction en éléments ; de ce fait, ils compliquent terriblement la division du travail scientifique, et empêchent la mise au point d’un agenda des problèmes ; à la fin ils renoncent à expliquer, et se bornent à décrire.

[69] Le terme de système dynamique désigne ici toute une variété de concepts physico-mathématiques : équations différentielles déterministes ou à paramètres aléatoires, équations différentielles stochastiques, équations aux dérivées partielles, processus stochastiques discrets (utilisés par exemple en physique statistique), etc. Soulignons que ces concepts ne sont pas seulement convoqués dans ce contexte pour recevoir une interprétation physicienne, ou plus généralement quantitative : ils servent dans la plupart des cas à construire des modèles qualitatifs , dont la composition mathématique permet toutefois de penser qu’ils pourraient ultérieurement s’articuler à des déterminations quantitatives empiriques. Quant aux systèmes complexes, une série de progrès remarquables enregistrés sur les trois dernières décennies a conduit en effet des physiciens, des mathématiciens, des biologistes, des informaticiens, des modélisateurs en sciences cognitives et sociales, à poser les bases d’un cadre d’objectivation transversal à leurs diverses disciplines, et dans lequel les questions de stabilité et d’instabilité, d’invariant et de variation, de régulation et de viabilité peuvent être repensées, à défaut de pouvoir toujours donner lieu à modélisation effective. On se bornera ici à en énumérer les rubriques suivantes – étant entendu qu’aucun modèle ne peut prétendre à les regrouper toutes : repérages à des échelles spatiales et temporelles multiples (au moins deux échelles, micro- et macroscopiques) ; importance des caractéristiques topologiques, dynamiques, et statistiques ; déterminations réciproques du local et du global ; multiples dynamiques de formation des unités (fusions et dissociations ; coalitions et compétitions ; recrutement, décrutements ; croissances, décroissances ; morts et naissances) ; co-existence à tout moment de différentes « phases » dynamiques ; adaptation et régulation (préservation active du domaine de viabilité interne et externe) ; dérive structurelle par couplage avec un environnement propre ; historicité et irréversibilité ; répertoires de comportements centrés sur des dynamiques instables constituant le noyau fonctionnel des systèmes. Avec ces recherches, la question des formes peut se poser désormais sans plus se diviser entre ses aspects individuels et collectifs, internes et externes, synchroniques et diachroniques. La multiplicité des niveaux d’organisation, leur émergence progressive, les causalités circulaires qui les sous-tendent, l’adaptation des systèmes à un environnement propre, constituent autant de possibilités d’élaborer le programme gestaltiste, en achevant de le doter de la dynamicité vers laquelle il pointait (4).

[70] Sur la question du déterminisme laplacien, et sur la distinction entre déterminisme mathématique et déterminisme physique, on pourra consulter La querelle du déterminisme (dossier rassemblé par K. Pomian, 1990), et Chaos et déterminisme (édité par A. Dahan-Dalmedico, J.-L. Chabert, K. Chemla, 1992 ; avec notamment les contributions de G. Israêl, p. 249-273, et A. Dahan, p. 371-406),

[71] L’œuvre de Turing, qui va du calcul logique aux problèmes de la morphogenèse, et définit comme on sait le projet d’une intelligence artificielle, est peut-être exemplaire des distinctions que nous esquissons ici, tout particulièrement dans la mesure où le calcul n’y aurait pas toujours le même statut explicatif. Cf. sur ce point le travail de Jean Lassègue, et notamment son livre Turing (1998 : 133-134).

[72] La dualité entre le ‘logique’ et le ‘mathématique’ reflèterait ce combat perpétuel (langages formels et calculs versus intuitions débordantes, mais en même temps déjà structurées, de l’infini, du continu, de l’espace).

[73] Le calcul approché des solutions d’équations différentielles (qu’on ne sait pas résoudre analytiquement) s’avère ici d’une importance capitale. Ainsi les phénomènes acquièrent une figure nouvelle, que l’on peut désormais fixer avec une certaine richesse de détails.

[74] Quelques références : Elman et al. 1996, Stewart et al. 1997 ; Dessalles 1996, 2000.

[75] Cassirer appelle formes symboliques les grands genres culturels à travers lesquels se diversifient les formes sémiotiques locales qui expriment les diverses directions prises par l’action et l’esprit humains : mythe, langage, art, religion, science. Une forme symbolique est donc une très vaste classe, extrêmement ramifiée, de processus.

[76] Disponible sur le site du séminaire : http://www.ens.fr/formes-symboliques.htm.

[77] Je décalque le titre du séminaire sur les Usages contemporains de la phénoménologie que J.M. Salanskis et F. Sebbah ont organisé au Collège de Philosophie ces dernières années (1999-2002).

[78] Pour une première présentation, cf. N. Depraz 2001, 5e partie ; cf. également les articles de F. Varela et N. Depraz, ainsi que l’introduction, dans Petitot, J., Varela, F., Pachoud, B., Roy, J.-M. éds. (1999).

[79] Hommage ici au séminaire Herméneutique et sciences cognitives de J.M. Salanskis (1994-1996). Un livre en est issu, qui doit paraître aux Presses du Septentrion (2003).

[80] N’oublions pas le simple phénomène du voir comme  : la façon dont nous voyons les choses dépend de la façon dont nous les nommons. Pour de timides avancées scientifiques dans cette direction, cf. The 2nd Annual Language and Space Workshop , University of Notre Dame, June 23-24 (L. Carlson, E. van der Zee, ed.). Avec notamment les articles de Smith ; Richards & Coventry ; Tversky & coll.

[81] Mais les parcours qui en résultent ne pourront être correctement décrits comme recherche d’un sens d’objet ; mieux vaut parler de thématisation, de modes d’accès et de passages. C’est une telle phénoménologie du langage que devraient réclamer les champions de la naturalisation, et non une phénoménologie déjà captée par un projet de fondation des sciences.

[82] Mais les rayons intentionnels dévoilés par ces epoche ne sont pas rectilignes ; ils ne se développent pas en traversant un milieu isotrope, suivant une loi immanente. Au contraire, ils n’accèdent à leurs thèmes qu’à la condition de passer, parfois délibérément, parfois par inadvertance et sans y penser, mais nécessairement quand même, par des strates de sens hétérogènes, impossibles à discipliner sous un type unique. Toute intentionnalité est riche de bifurcations, de transpositions, qu’elle recèle pour l’avenir, et dont elle provient. Il n’y a pas d’intentionnalité originaire, ou autonome, qui pourrait se passer des frayages, des accès, ménagés par d’autres intentions peut-être totalement impertinentes à son propos – intentions qui étaient, ou seront, elles aussi dans ce même cas par rapport à d’autres. La grammaire, par exemple, est un tel ensemble de routines d’accès. Peut-on penser qu’elle instancie partout la même logique ? Peut-on juger cette logique à partir de ce que l’on aurait à dire ? Mais pour cela, il faudrait (au moins) une autre grammaire, et ainsi de suite. Tout ce que l’on peut faire, c’est changer de médiation, en changeant de formulation.


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