SÉMANTIQUE TEXTUELLE 1

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3.2.3. Analyses textuelles

B. Classes, isotopies, parcours interprétatifs

a)  « Du pain, du vin, du Boursin » entrée dans la classe (vs sortie de classe in Saab, C+…)

- Problème interprétatif : peut-être y a-t-il in effet de surprise dans cette extension d’une classe fermée « du pain, du vin » (et juxtaposition catégories « pain » et « vin » et élément d’une catégorie « Boursin »). Domaine //alimentation// et taxème //aliments// : mais ici, plutôt qu’une succession ou une relation paradigmatique de type hyperonymie/hyponymie et qui repérerait comme sp /ce qui se boit/ (à base de raisin, le « vin » qui ferait lien avec les deux autres composants) et /ce qui se mange/ (à base de farine ou de lait), c’est ce qui va ensemble au cours d’une phase – terminative – d’un repas à la française. Pain et vin accompagnent en fait le Boursin (élément principal).

- Condition d’accueil : énumération de 3 SN sur le même plan (avec « du » partitif et effets des récurrences nasales identiques) – 3 noms communs (même classe) : en fait « Boursin » est un nom propre devenu nom commun (antonomase catégorisante). En fait chaque élément se présente comme un élément représentatif de classe (classe du pain, du vin et du fromage ; le Boursin est en quelque sorte un parangon de la classe des fromages).

=> source : pain et vin ; cible : Boursin

- Interprétants et opérations interprétatives : (noter qu’ici le nouveau taxème « se tient » tous les termes relevant de l’alimentation, à l’inverse de ce qui se passe pour « amour fraternité et mayonnaise » - interprétation non vraiment contrainte, cf. pas de véritable problème…) : les interprétants sont ici d’ordre encyclopédique :

sur un plan profane, le pain et le vin représentent des symboles d’une alimentation (française) traditionnelle et comportent un trait /essentialité/ ; sur un plan religieux (cf. l’eucharistie), ils comportent un trait /sacré/ (tradition alimentaire et religion valant sga) ; les éléments du taxème profane comme ceux du taxème religieux sont valorisés ; on est là au niveau de sasn [mais qui ne sont pas prescrits par le contexte ; ils servent d’interprétant et peut-être ont-ils le statut de si sociolectaux ?]. Ces deux interprétants ne sont pas exclusifs l’un de l’autre (il est courant en publicité de mêler le pratique et le mythique, mais ici, en outre, les deux plans sont quelque peu « mythiques »). A partir de ces valeurs socialement normées, il se produit (assimilation) une propagation des traits /essentiel/ et /sacré/ sur « Boursin ». Ce sont en fait ces sac les plus importants dans la pratique publicitaire (qui englobe tradition et religion, ou deux traditions – jonction de domaines ?) de valorisation (c’est le connotatif qui passe au premier plan ainsi que Boursin dans la liste).

Ces traits communs (/essentiel/, /sacré/, mais je pense que c’est le premier qui opère surtout ; c’est plus distancié pour le second), ne sont pas pour autant génériques, car, dans la perspective publicitaire de promotion, le produit promu (de marque) se doit d’être particulièrement valorisé ; il est intégré à une classe qui lui confère cette valorisation, mais on peut penser qu’il est plus valorisé que les autres. Il y aurait donc une différence de degré entre « du pain, du vin » d’un côté, et « du Boursin » de l’autre (spa). Une accentuation valorisante caractérise aussi bien l’entrée dans la classe que la sortie de classe.

C’est à revoir, car assez complexe

b) « les hommes aiment à être éblouis mais non pas éclairés » (Proudhon, 1809-1865)

- condition d’accueil : structure morpho-syntaxique de la phrase qui présente une disjonction (mais réfutatif).

 - problème : vient de cette mise en opposition de deux termes (éblouis/éclairés) dont le premier, dans une certaine interprétation (physique, sensorielle), n’est qu’une intensification du second (ébloui présuppose éclairé) ; de plus, dans ce cadre sensoriel, ébloui peut avoir une valeur négative (j’ai été ébloui etc.).

- interprétant : essentiellement le genre (gnomique, cf « les hommes » et le présent de vérité générale) de cet énoncé qui invite à une interprétation « morale ».

- opération : lecture dissimilatrice. Cette isotopie de la « lumière » se répartit sur des dimensions/facultés différentes (sensation, impression vs jugement) avec probablement des actualisations réciproques des traits dimensionnels (chaque terme étant à la fois source et cible) ; sens figuré dans les deux cas. Un premier problème porte donc sur la dimension sur laquelle on doit lire ces termes. Ensuite, propagation de /+mélioratif/ sur « éblouis » et de /-mélioratif/ sur « éclairés » (c’est le point de vue des « hommes » et, dans cette interprétation, l’intensification ne semble jouer qu’à un niveau superficiel : on n’est pas sur le même plan, mais je ne suis pas sûr). Le point de vue de l’énonciateur inverse les valeurs (il vaut mieux être éclairé qu’ébloui)].

c)

V. Hugo, Booz, fin

Même isotopie et topos que précédemment (hommes :moraliste ::jeunes gens :vieillard). Le contexte restreint – « aux yeux »/ « dans l’œil » : faire un sort à la différence pl/sg ici aussi bien que dans «des  jeunes gens » vs « du vieillard » - sélectionne semble-t-il les acceptions de « flamme et de « lumière » ; c’est évident pour « flamme » dont est actualisée l’acception « éclat, brillant» - en parlant des yeux, acception non enregistrée comme figurée dans le dictionnaire – voire l’acception abstraite (décrite comme figurée dans le dictionnaire) « ardeur, feu » (+ amoureux, cf. contexte large ici) ; pour « lumière » le sens physique est présent mais il se double surtout, contrastivement par rapport à « flamme », d’un sens abstrait de type /sagesse/, /maturité/, /divin/ cf. « éternels ». Diverses afférences se produisent du fait du contexte local :

- aspectuelles : pour « flamme » : /discontinu/ (cf. pluriels), /intensité +/, /instabilité/ cf. « changeants » ; pour « lumière » : /continu/ (cf. sg), /intensité -/, /stabilité/ cf. « jours éternels » etc.

-  axiologiques : articulation autour des valeurs sémantico-pragmatiques des « mais » qui opposent non pas du dévalorisé et du valorisé, mais du moins valorisé à du plus valorisé (afférence en contexte), de façon graduelle. Construction axiologique contextuelle qui relève d’un processus tropique.

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